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bonnes-feuilles

Céline...

LF Céline
Louis-Férdinand Céline est un de mes auteurs préférés. Je vous le conseille en 4 tomes dans la Pléïade (l'enfer sur papier bible).
Loin de voler les droits de ses auteurs, ces extraits vous aiderons à entrer dans l'oeuvre et à acheter ces livres.

Bonne lecture...

 


Préambule du VOYAGE :
Voyager, c’est bien utile, ça fait travailler l’imagination. Tout le reste n’est que déceptions et fatigues. Notre voyage à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force.
Il va de la vie à la mort. Hommes, bêtes, villes et choses, tout est imaginé. C’est un roman, rien qu’une histoire fictive. Littré le dit, qui ne se trompe jamais.
Et puis d’abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de fermer les yeux.
C’est de l’autre côté de la vie.

Discours

Mort à crédit (passage spécial pour médecin)

D'un château l'autre

 

« La guerre en somme c'était tout ce qu'on ne comprenait pas. Ça ne pouvait pas continuer. » Voyage au bout de la nuit, 1932
« L'amour, c'est l'infini à la portée des caniches. » Voyage au bout de la nuit, 1932
« La médecine, c'est ingrat. Quand on se fait honorer par les riches, on a tout du larbin, par les pauvres, on a tout du voleur » Voyage au bout de la nuit, 1932
« Ah ! s'amuser avec sa mort tout pendant qu'il la fabrique, ça c'est tout l'Homme, Ferdinand ! » Mort à crédit, 1936
En 1949 : « Que lira-t-on en l'an 2000 ? Plus guère que Henri Barbusse, Paul Morand, Ramuz et moi-même, il me semble. »
« Il me manque encore quelques haines. Je suis certain qu'elles existent. » Mea Culpa, 1936
« Et il nie qu'il pisse. » Entretiens avec le professeur Y
« En matière de roman, il n'y a rien de plus vulgaire qu'une idée. »
« Exactement [à la question d'Albert Zbinden qui lui demande s'il a été antisémite]. Dans la mesure où je supposais que les sémites nous poussaient dans la guerre. Sans ça je n'ai évidemment rien - je ne me trouve nulle part en conflit avec les sémites ; il n'y a pas de raison. Mais autant qu'ils constituaient une secte, comme les Templiers, ou les Jansénistes, j'étais aussi formel que Louis XIV. Il avait des raisons pour révoquer l'édit de Nantes, et Louis XV pour chasser les Jésuites... Alors voilà, n'est-ce pas : je me suis pris pour Louis XV ou pour Louis XIV, c'est évidemment une erreur profonde. Alors que je n'avais qu'à rester ce que je suis et tout simplement me taire. Là j'ai péché par orgueil, je l'avoue, par vanité, par bêtise. Je n'avais qu'à me taire... Ce sont des problèmes qui me dépassaient beaucoup. Je suis né à l'époque où on parlait encore de l'affaire Dreyfus. Tout ça c'est une vraie bêtise dont je fais les frais. » (Entretien avec Albert Zbinden, 1957)
« Le philosémitisme délirant de Bagatelles a été très mal compris par la plupart des Juifs qui, entre nous, sont de sacrés cons quand ils s'y mettent. Pour certains d'entre eux, au contraire, surtout parmi les Sionistes, Bagatelles est un livre de chevet ; un monument élevé à la gloire d'Israël. C'est absolument exact. » (Le gala des vaches, les éditions de l'Élan, 1948, p.88)
« Ecoute la fin! le sang des blancs ne résiste pas au métissage!... il tourne noir, jaune!... et c'est fini! le blanc est né dans le métissage, il fut créé pour disparaître! sang dominé! Azincourt, Verdun, Stalingrad, la ligne Maginot, l'Algérie, simple hachis!... viandes blanches! » Rigodon

 

 

 

 

 

LOUIS FERDINAND CÉLINE VOUS PARLE

Eh bien voilà! Ayant vécu dans bien des endroits, sous des climats différents, et dans des conditions différentes, je me trouve à présent prié de donner mon impression sur mes chefs d'oeuvre dans un décor de chaise électrique… Mais ça ne va pas me troubler du tout, je vais dire tout ce que j'en pense, et personne ne m'empêchera de parler. Eh bien voyez vous je vais aller vite, parce que je crois que ces choses là coûtent très cher, il faut donc être ménager de ses mots je parle tout de suite de ce que je sais et de ce que j'ai lu. Dans les Mémoires de George Sand, on me lit pas beaucoup George Sand, mais on lit encore un peu ses Mémoires, et moi en particulier je les ai lus, il y a un chapitre remarquable où, étant jeune fille, elle allait au-devant de la vie, et elle avait des idées de gauche, d'extrême gauche même pour l'époque. Elle était accueillie, elle avait accès, de par sa naissance et par sa notoriété on sait que c'était une arrière petite fille du prince de Saxe , elle avait accès dans les grands salons, et en particulier dans ceux où se rassemblaient encore les membres de l'ancienne aristocratie, mais la vraie ! celle qui existait encore, qui était sortie de la cour de Louis XVI, avec quel mal ! et même de Louis XV. Et elle regardait ces membres de l'aristocratie avec grande épouvante : la manière dont ils gesticulaient, dont ils s'agitaient, dont ils s'offraient des petits fours, dont ils s'avançaient des chaises, les retiraient, cachaient leur perruque entre les seins des dames, et puis ensuite les mettaient sous Leur derrière, et puis faisaient mille grâces, mille petits chichis... Elle en était épouvantée, de voir ces vieux d'une époque disparue faire tant de grimaces. Eh bien, personnellement, je trouve ce chapitre essentiel. je crois que Proust lui même s'en est bien servi, dans ce fameux chapitre où on voit les gens vieillir sur place; c'est un chapitre fameux, mais là je crois que George Sand l'a précédé; c'est vraiment un très gros effort littéraire. Eh bien j'ai la même impression quand je lis un livre; j'ai l'impression de gens qui font des grimaces. Ils font des singeries tout à fait inutiles. Ils ne vont pas directement dans le sujet, ils tournent autour, ils s'avancent des chaises, ils font des prologues; mais ils ne vont pas directement au nerf, n'est ce pas, à l'émotion, ils n'y vont pas du tout. Alors voilà : pour tout dire, je regarde les romans de mes contemporains, je me dis : « Ça signifie déjà du travail, mais du travail inutile. » Voilà ce que pense. Parce qu'ils ne sont pas à la mesure de l'époque, ni dans le ton de l'époque. Le ton de l'époque, eh bien mon Dieu... Il faut tenir compte que le roman, puisqu'il s'agit de roman, puisque c'est là dessus qu'on me demande donner ma pensée, le roman n'a plus la mission qu'il avait ; il n'est plus un organe d'information. Du temps de Balzac on apprenait la vie d'un médecin de campagne dans Balzac du temps de Flaubert, la vie de l'adultère dans Bovary etc etc. Maintenant nous sommes renseignés sur tous ces chapitres, énormément renseignés : et par la presse, et par les tribunaux, et par la télévision, et par les enquêtes médico-sociales. Oh! il y en a des histoires, avec des documents, des photographies... Il n'y a plus besoin de tout ça. je crois que le rôle documentaire, et même psychologique, du roman est terminé, voilà mon impression. Et alors, qu'est ce qui lui reste Eh bien, il ne lui reste pas grand chose, il lui reste je style et puis les circonstances où le bonhomme se trouve. Proust évidemment se trouvait dans le monde, eh bien a raconte le monde, n'est ce pas, ce qu'il voit, et puis enfin les petits drames de la pédérastie. Bon. Très bien. Maïs enfin, il s'agit de se placer dans la ligne où vous place la vie_ et puis de ne pas en sortir, de façon à recueillir tout ce qu'a y a, et puis de transposer en style. Alors, question de style. Le style de tous ces trucs là, je le trouve dans le même ton que le bachot, dans le même ton que le journal habituel dans le même ton que les plaidoiries, dans le même ton que les déclarations à la Chambre, c'est à dire un style verbal, éloquent peut être, mais en tout cas certainement pas émotif je les regarde comme les impressionnistes devaient regarder les peintres de leur époque, qui le leur rendaient bien. Evidemment l'impressionniste, quand il regardait l'église d'Auvers par un peintre de l'époque, un bon peintre de l'époque, ce n'était pas du Van Gogh ! Et l'autre disait « Mais c'est une horreur, c'est un malfaiteur, il faut le tuer ! Eh bien, ils pensent encore ça de mes livres, évidemment.
Je dis que ce que l'on fait, ce sont des romans inutiles, parce que ce qui compte, c'est le style, et le style, personne ne veut s'y plier. Ça demande énormément de travail, et les gens ne sont pas travailleurs, ils ne vivent pas pour travailler, ils vivent pour jouir de la vie, alors ça ne permet pas beaucoup de travail. Les impressionnistes étaient de très gros travailleurs. Sans travail, il n y a pas grand chose a faire. Il y a l'éloquence naturelle : c'est vraiment très mauvais, L’éloquence naturelle. Il faut que ça tienne à la page. Pour tenir sur une page, ça demande un très gros effort.
Je trouve que là, il y a quelque chose à faire entièrement, un style. Eh bien, des styles, il n'y en a pas beaucoup dans une époque, vous savez. Sans être bien prétentieux il n'y en a pas beaucoup. Il y en a trois ou quatre par génération il but dire la vérité, parce que, si je ne la dis pas, personne ne là dira. Ils sont décadents eux mêmes, après; ils ne durent qu'un temps. Il y a une notion de la vie, une philosophie générale, qui fait que la vie est éternelle, que la vie commence à soixante ans, à cinquante ans... Non! Non! Elle est passagère! C'est donc le temps qui régit, et il ne dure pas toujours. George Sand se moquait de ces vieilles grimaces des anciens courtisans. Mais elle même, si nous la voyions maintenant, nous la trouverions parfaitement ridicule. Il y a donc un temps, un temps précis. Regardez les grandes histoires. Qu'est ce qui tient au théâtre? Pas grand chose. On revient toujours à Shakespeare, forcément. Shakespeare, il a pour lui le costume, ça le sauve. Il se situe donc hors de son époque. Là il a gagné. Tandis que si nous jouons du Shakespeare en costume de ville, nous savons que c'est très mauvais, ça ne donne pas l'effet. Il y a toute espèce de choses qui concourent.
Alors on dit : les romans de Céline, c'est agaçant, c'est crispant, etc. : parce que ça n'est pas dans le style du bachot, dans le style admis, le style du journal habituel, le style de la licence. Styles qui vraiment s'imposent, formellement, et qui tiennent, et qui tiendront, je vais vous dire pourquoi, peu à peu.
je reviens à ce style. Ce style, il est fait d'une certaine façon de forcer les phrases à sortir légèrement de leur signification habituelle, de les sortir des gonds pour ainsi dire, les déplacer, et forcer ainsi le lecteur à lui même déplacer son sens. Mais très légèrement! Oh ! très légèrement ! Parce que tout ça, si vous faites lourd, n'est ce pas, c'ait une gaffe, c'est la gaffe. Ça demande donc énormément de recul, de sensibilité; c'est très difficile à faire, parce qu'il faut tourner autour. Autour de quoi? Autour de l'émotion.
Alors là, j'en reviens à ma grande attaque contre le Verbe. Vous savez, dans les Écritures, il est écrit : « Au commencement était le Verbe. » Non! Au commencement était l'émotion. Le Verbe est venu ensuite pour remplacer l'émotion, comme le trot remplace le galop, alors que la loi naturelle du cheval est le galop; on lui fait avoir le trot. On a sorti l'homme de la poésie émotive pour le faire entrer dans la dialectique, c'est à dire le bafouillage, n'est ce pas? Ou les idées. Les idées, rien n'est plus vulgaire. Les encyclopédies sont pleines d'idées, il y en a quarante volumes, énormes, remplis d'idées. Très bonnes, d'ailleurs. Excellentes. Qui ont fait leur temps. Mais ça n'est pas la question. Ce n'est pas mon domaine, les idées, les messages. je ne suis pas un homme à message. je ne suis pas un homme à idées. je suis un homme à style. Le Style, dame, tout le monde s'arrête devant, personne n'y vient à ce truc là. Parce que c'est un boulot très dur. Il consiste à prendre les phrases, je vous le disais, en les sortant de leurs gonds. Ou une autre image : si vous prenez un bâton et si vous voulez le faire paraître droit dans l'eau, vous allez le courber d'abord, parce que la réfraction fait que si je mets ma canne dans l'eau, elle a l'ait d'être cassée. Il faut la casser avant de la plonger dans l'eau. C'est un vrai travail. C'est le travail du Styliste.
Souvent les gens viennent me voir et me disent : « Vous avez l'air d'écrire facilement. » Mais non ! je n'écris pas facilement! Qu'avec beaucoup de peine! Et ça m'assomme d'écrire, en plus. Il faut que ça soit fait très très finement, très délicatement. Ça fait du 80.000 pages pour arriver à faire 800 pages de manuscrit, où le travail est effacé. On ne le voit pas. Le lecteur n'e§t pas supposé voir le travail. Lui, c'est un passager. Il a payé sa place, il a acheté le livre. Il ne s'occupe pas de ce qui se passe dans les soutes, il ne s'occupe pas de ce qui se passe sur le pont, il ne sait pas comment on conduit le navire. Lui, il veut jouir. La délectation. Il a le livre, il doit se délecter. Mon devoir à moi est de le faire se délecter, et à cela je m'emploie. Et je veux donc qu'il me dise : « Ah ! vous faites ça... Ah c'est facile... Ah! moi mon Dieu, si j'avais votre facilité! » Mais je n'ai pas de facilité du tout, nom de Dieu! Aucune. Rien du tout. Les types sont beaucoup plus doués que moi. Seulement je me mets au travail. Le travail, eux, ils ne le mettent pas, ils ne se concentrent pas. Voilà l'aventure.
On entend dire : « Bon. Très bien. Il met trois points, trois points... » Vous savez, trois points, les impressionnistes ont fait trois points. Vous avez Seurat, il mettait des trois points partout; il trouvait que ça aérait, ça faisait voltiger sa peinture. Il avait raison, cet homme. Ça a pas fait beaucoup école. On respecte beaucoup Seurat, on l'achète très cher'. Mais enfin, on ne peut pas dire qu'il ait fait des petits. je ne crois pas que moi on me suive beaucoup. N'ayez pas peur. On en prendra un petit peu, un petit bout par ci, par là, mais pas beaucoup. C'est trop dur. De même que Seurat... on n'a pas continué.
Je vais vous dire pourquoi. je vais aller plus loin, je me demandais ce matin pourquoi on résistait à changer de style. Les grandes civilisations ont changé souvent de style. Je parle des grandes civilisations disparues, oubliées, que ce soit les Sumériens, les Araméens, toutes ces civilisations, il y en a quarante, cinquante, entre le Tigre et l'Euphrate, qui ont eu des poètes, qui ont eu des écrivains, qui ont eu des législateurs. Ils ont changé souvent de style. Les Français, eux, sont soudés; ils sont soudés au style Voltaire, qui était une jolie forme d'ailleurs, qui fut copié par Bourget, par Anatole France, et puis finalement par tout le monde. Il m'a été donné de lire La Revue des Deux Mondes des cent dernières années. Il y a là dedans toute espèce de romans faciles; il n'y a qu'à rajouter des téléphones, des avions, et ça ira très bien. On est resté sous un style.
Parce que je crois que pour avoir un nouveau style, il faut une civilisation très neuve, très forte plutôt. Par exemple, vous avez en ce moment ci les Chinois qui tapent dans leur langue et qui sont en train de se défaire de leurs caractères, de leur style même, parce que vous savez que la langue chinoise est une langue très complexe, qui était comprise grâce à des artifices par une certaine secte. Eh bien, eux, ils ont le courage, et ils ont la force, dirons nous, la passion, de se défaire entièrement de l'ancien chinois pour faire un autre chinois plus neuf. Et ça, ça n'arrive pas... Remarquez, les Américains n'ont jamais rien fait de nouveau. Quand ils cherchent un mot, ils piochent dans le latin, péniblement, ils n'ont jamais rien inventé du tout. C'est très difficile d'inventer des mots, et c'est très difficile de changer de style. À ce point que je crois que celui là est vraiment ce qu'il faut à notre petite civilisation française, qui aura duré quatre cents ans, quatre siècles, rien du tout. Alors ils sont fixés à ça, je peux dire, parce qu'ils n'ont plus la force, la passion qu'il faut pour changer de style. On ne peut pas.
Vous savez, j'ai été pendant vingt ans médecin à Clichy, au dispensaire de Clichy, et je me suis occupé de l'histoire de Clichy. Clichy la Garenne, près de Paris. J'ai mis un historien là dessus, un ami, qui est mort maintenant. Il s'appelait Sérouille. J'ai écrit une préface, on a supprimé le livre et la préface, parce que tout ça, c'était défendu; bon. Il y avait dans cette histoire de Clichy bien des faits remarquables, mais il y en avait un surtout qui était drôle, c'était qu'il y avait à un moment donné, vers 18 70, un curé à Clichy qui avait dit : « Ces gens là ne comprennent pas du tout le latin, je leur fais la messe pour rien; je vais faire la messe en français. » Oh ! mais là il avait été tancé par la Commission des Rites, et finalement il avait été chassé de son église, et on a redit la messe en latin. Pourquoi? je demandais alors à Sérouille. Il a réfléchi longuement et il m'a dit : « Parce qu'il n'y avait plus assez de foi. » En effet. C'est l'histoire : c'est la foi. Regardez les Russes, ils ne changent pas le russe, n'est ce pas. Par conséquent ils n'ont pas une grande foi. Les Français n'ont certainement plus la foi pour changer leur langue, pas assez de chaleur pour ça.
Je pourrais d'ailleurs donner plus vulgairement et plus compréhensiblement un exemple dans la publicité des journaux que je lis, les grands hebdomadaires. je ne regarde pas beaucoup le texte, ça n'est pas intéressant. je regarde les publicités. Elles me donnent bien l'idée de ce que les gens réclament. Ça coûte beaucoup d'argent, donc ça c'est pas fait pour rien. Il y a des réclames pour la margarine. je vois un grand père et une grand mère. La grand mère dit : « je vais me servir de la margarine X. » Et le grand père qu'on représente répond : « Mais tu es folle! À nos âges, on ne change pas nos habitudes! » Eh bien c'est tout à fait le cas de la France. La France a passé l'âge de changer d'habitude. Il est donc très certain, presque certain, qu'elle ne va pas changer de style pour me faire plaisir. Alors moi, je grattouillerai toujours dans mes perfectionnements mes raffinements, mais ça ne sert à rien du tout. On continuera toujours à publier du Bourget, de l'Anatole France, de la phrase bien filée, etc. Donc, c'est un coup pour la gloire, c'est vraiment de la vanité. J'en suis au désespoir moi même et, je vous prie, avec beaucoup de mal. Ceci dit, je n'ai plus qu'à me retirer. Je n'ai plus grand chose à dire. Non... Non... je vous remercie. Ça va comme ça. je crois...


MORT A CREDIT

Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd, si triste... Bientôt je serai vieux. Et ce sera enfin fini. Il est venu tant de monde dans ma chambre. Ils ont dit des choses. Ils ne m'ont pas dit grand chose. Ils sont partis. Ils sont devenus vieux, misérables et lents chacun dans un coin du monde.
Hier à huit heures Madame Bérenge, la concierge, est morte. Une grande tempête s'élève de la nuit. Tout en haut, où nous sommes, la maison tremble. C'était une douce et gentille fidèle amie. Demain on l'enterre rue des Saules. Elle était vraiment vieille, tout au bout de la vieillesse. Je lui ai dit dès le premier jour quand elle a toussé : « Ne vous allongez pas surtout!... Restez assise dans votre lit! » Je me méfiais. Et puis voilà... Et puis tant pis.
Je n'ai pas toujours pratiqué la médecine, cette merde. Je vais leur écrire qu'elle est morte Madame Bérenge à ceux qui m'ont connu, qui l'ont connue. Où sont ils?
Je voudrais que la tempête fasse encore bien plus de boucan, que les toits s'écroulent, que le printemps ne revienne plus, que notre maison disparaisse.
Elle savait Madame Bérenge que tous les chagrins viennent dans les lettres. Je ne sais plus à qui écrire... Tous ces gens sont loin... Ils ont changé d'âme pour mieux trahir, mieux oublier, parler toujours d'autre chose...
Vieille Madame Bérenge, son chien qui louche on le prendra, on l'emmènera...
Tout le chagrin des lettres, depuis vingt ans bientôt, s'est arrêté chez elle. Il est là dans l'odeur de la mort récente, l'incroyable aigre goût... Il vient d'éclore... Il est là... il rôde... Il nous connaît, nous le connaissons à présent. Il ne s'en ira plus jamais. Il faut éteindre le feu dans la loge. A qui vais je écrire ? Je n'ai plus personne. Plus un être pour recueillir doucement l'esprit gentil des morts... pour parler après ça plus doucement aux choses... Courage pour soi tout seul!
Sur la fin ma vieille bignolle, elle ne pouvait plus rien dire. Elle étouffait, elle me retenait par la main... Le facteur est entré. Il l'a vue mourir. Un petit hoquet. C'est tout. Bien des gens sont venus chez elle autrefois pour me demander. Ils sont repartis loin, très loin dans l'oubli, se chercher une âme. Le facteur a ôté son képi. Je pourrais moi dire toute ma haine. Je sais. Je le ferai plus tard s'ils ne reviennent pas. J'aime mieux raconter des histoires. J'en raconterai de telles qu'ils reviendront, exprès, pour me tuer, des quatre coins du monde. Alors ce sera fini et je serai bien content.

A la clinique où je fonctionne, à la Fondation Linuty on m'a déjà fait mille réflexions désagréables pour les histoires que je raconte... Mon cousin Gustin Sabayot, à cet égard il est formel : je devrais bien changer mon genre. Il est médecin lui aussi, mais de l'autre côté de la Seine, à la Chapelle Jonction. Hier j'ai pas eu le temps d'aller le voir. Je voulais lui parler justement de Madame Bérenge. Je m'y suis pris trop tard. C'est un métier pénible le nôtre, la consultation. Lui aussi le soir il est vanné. Presque tous les gens ils posent des questions lassantes. Ça sert à rien qu'on se dépêche, il faut leur répéter vingt fois tous les détails de l'ordonnance. Ils ont plaisir à faire causer, à ce qu'on s'épuise... Ils en feront rien des beaux conseils, rien du tout. Mais ils ont peur qu'on se donne pas de mal, pour être plus sûrs ils insistent; c'est des ventouses, des radios, des prises... qu'on les tripote de haut en bas... Qu'on mesure tout... L'artérielle et puis la connerie... Gustin lui à la Jonction ça fait trente ans qu'il pratique. Les miens, mes pilons, j'y pense, je vais les envoyer un beau matin à la Villette, boire du sang chaud. Ça les fatiguera dès l'aurore... Je ne sais pas bien ce que je pourrais faire pour les dégoûter....
Enfin avant hier j'étais décidé d'aller le voir, le Gustin, chez lui. Son bled c'est à vingt minutes de chez moi une fois qu'on a passé la Seine. Il faisait pas joli comme temps. Tout de même je m'élance. Je me dis je vais prendre l'autobus. Je cours finir ma séance. Je me défile par le couloir des pansements. Une gonzesse me repère et m'accroche. Elle a un accent qui traînaille, comme le mien. C'est la fatigue. En plus ça racle, ça c'est l'alcool. Maintenant elle pleurniche, elle veut m'entraîner. « Venez Docteur, je vous supplie! ... ma petite fille, mon Alice !... C'est rue Rancienne! ... c'est à deux pas!... » Je ne suis pas forcé d'y aller. En principe moi je l'ai finie, ma consultation !... Elle s'obstine ... Nous sommes dehors... J'en ai bien marre des égrotants ... En voici trente emmerdeurs que je rafistole depuis tantôt... J'en peux plus... Qu'ils toussent! Qu'ils crachent! Qu'ils se désossent! Qu'ils s'empédèrent! Qu'ils s'envolent avec trente mille gaz dans le croupion !... Je m'en tartine !... Mais la pleureuse elle m'agrafe, elle se pend vachement à mon cou, elle me souffle son désespoir. Il est plein de « rouquin »... Je suis pas de force à lutter. Elle me quittera plus. Quand on sera dans la rue des Casses qui est longue et sans lampe aucune, peut être que je vais lui refiler un grand coup de pompe dans les miches... Je suis lâche encore... Je me dégonfle ... Et ça recommence, la chansonnette. « Ma petite fille! ... Je vous en supplie, Docteur !... Ma petite Alice!... Vous la connaissez ? ... » La rue Rancienne c'est pas si près... Ça me détourne ... Je la connais. C'est après les Usines aux câbles... Je l'écoute à travers ma berlue ... « On n'a que 82 francs par semaine... avec deux enfants! ... Et puis mon mari qui est terrible avec moi !... C'est une honte, mon cher Docteur!... »
Tout ça c'est du mou, je le sais bien. Ça pue le grain pourri, l'haleine des pituites...

On est arrivé devant la tôle ...
Je monte. Je m'asseye enfin ... La petite môme porte des lunettes.
Je me pose à côté de son lit. Elle joue quand même un peu encore avec la poupée. Je vais l'amuser à mon tour. Je suis marrant, moi, quand je m'y donne... Elle est pas perdue la gniarde... Elle respire pas très librement... C'est congestif c'est entendu.... Je la fais rigoler. Eue s'étouffe. Je rassure la mère. Elle en profite, la vache, alors que je suis paumé dans sa crèche pour me consulter à son tour. C'est à cause des marques des torgnioles, qu'elle a plein les cuisses. Elle retrousse ses jupes, des énormes marbrures et même des brûlures profondes. Ça c'est le tisonnier. Voilà comme il est son chômeur. Je donne un conseil... J'organise avec une ficelle un petit va et vient très drôle pour la moche poupée... Ça monte, ça descend jusqu'à la poignée de la porte... c'est mieux que de causer.
J'ausculte, y a des râles en abondance. Mais enfin c'est pas si fatal... Je rassure encore. Je répète deux fois Les mêmes mots. C'est ça qui vous pompe... La môme elle se marre à présent. Elle se remet à suffoquer. Je suis forcé d'interrompre. Elle se cyanose... Y a peut être un peu de diphtérie? Faudrait voir... Prélever ?... Demain!...
Le pape rentre. Avec ses 82 francs, on se tape rien que du cidre chez lui, plus de vin du tout. « Je bois au bol. Ça fait pisser! » qu'il m'annonce tout de suite. Il boit au goulot. Il me montre... on se congratule qu'elle est pas si mal la mignonne. Moi, c'est la poupée qui me passionne... Je suis trop fatigué pour m'occuper des adultes et des pronostics. C'est la vraie caille les adultes! J'en ferai plus un seul avant demain.
Je m'en fous qu'on me trouve pas sérieux. Je bois à la santé encore. Mon intervention est gratuite, absolument supplémentaire. La mère me ramène à ses cuisses. Je donne un suprême avis. Et puis, je descends l'escalier. Sur le trottoir voilà un petit chien qui boite. Il nie suit d'autorité. Tout m'accroche ce soir. C'est un petit fox ce chien là, un noir et blanc. Il est perdu ça me parait. C'est ingrat les chômeurs d'en haut. Ils ne me raccompagnent 7* Je suis sûr qu'ils recommencent à se battre. Je
entends qui gueulent. Qu'il lui fonce donc son tison tout r dans le trou du cul! Ça la redressera la salope! Ça rendra à me déranger!
présent je m'en vais sur la gauche... Sur Colombes, en me. Le petit chien, il me suit toujours... Après ières c'est la Jonction et puis mon cousin. Mais le petit chien boite beaucoup. Il me dévisage. Ça me dégoûte de le voir traînasser. Faut mieux que je rentre après tout. On est «venu par le Pont Bineux et puis le rebord des usines. Il était pas tout à fait fermé le dispensaire en arrivant... J'ai dit à Madame Hortense : « On va nourrir le petit clebs. Il faut que quelqu'un cherche de la viande... Demain à la première heure on téléphonera... Ils viendront de la « Protectrice » le chercher avec une auto. Ce soir il faudrait l'enfermer. » Alors je suis reparti tranquille. Mais c'était un chien trop craintif. Il avait reçu des coups trop durs. La rue c'est méchant. Le lendemain en ouvrant la fenêtre, il a même pas voulu attendre, il a bondi à l'extérieur, il avait peur de nous aussi. Il a cru qu'on l'avait puni. Il comprenait rien aux choses. Il avait plus confiance du tout. C'est terrible dans ces cas là.
Il me bien connaît Gustin. Quand il est à jeun il est d'un excellent conseil. Il est expert en joli style. On peut se fier à ses avis. Il est pas jaloux pour un sou. Il demande plus grand chose au monde. Il a un vieux chagrin d'amour. Il a pas envie de le quitter. Il en parle tout à fait rarement. C'était une femme pas sérieuse. Gustin c'est un coeur d'élite. Il changera pas avant de mourir.
Entre temps, il boit un petit peu...
Mon tourment à moi c'est le sommeil. Si j'avais bien dormi toujours j'aurais.jamais écrit une ligne.
« Tu pourrais, c'était l'opinion à Gustin, raconter des choses agréables... de temps en temps... C'est pas toujours sale dans la vie... » Dans un sens c'est assez exact. Y a de la manie dans mon cas, de la partialité. La preuve c'est qu'à


l'époque où je bourdonnais des deux oreilles et encore bien plus qu'à présent, que j'avais des fièvres toutes les heures j'étais bien moins mélancolique... Je trafiquais de très beaux rêves... Madame Vitruve, ma secrétaire, elle m'en faisait aussi la remarque. Elle connaissait bien mes tourments. Quand on est si généreux on éparpille ses trésors on les perd de vue... Je me suis dit alors : « La garce de Vitruve, c'est elle qui les a planqués quelque part... » Des véritables merveilles... des bouts de légende... de la pu
extase... C'est dans ce rayon là que je vais me lancer désormais... Pour être plus sûr je trifouille le fond de mes papiers... Je ne retrouve rien... je téléphone à Delumelle mon placeur; je veux m'en faire un mortel ennemi... Je veux qu'il râle sous les injures... Il en faut pour le cailler 1... Il s'en fout! Il a des millions. Il me répond de prendre des vacances... Elle arrive enfin, ma Vitruve. Je me méfie d'elle. J'ai des raisons fort sérieuses. Où que tu l'as mise ma belle oeuvre ? que je l'attaque comme ça de but en blanc. J'en avais au moins des centaines des raisons pour la suspecter...
La Fondation Linuty, c'était devant le ballon en bronze à la Porte Pereire. Elle venait là me rendre mes copies, presque tous les jours quand j'avais fini mes malades. Un, petit bâtiment temporaire et rasé depuis. Je m'y plaisais pas. Les heures étaient trop régulières. Linuty qui l'avait créée c'était un très grand millionnaire, il voulait que tout le monde se soigne et se trouve mieux sans argent. C'est emmerdant les philanthropes. J'aurais préféré pour ma part un petit business municipal... Des vaccinations en douce ... Un petit condé de certificats... Un bain douche même ... Une espèce de retraite en somme. Ainsi soit il. Mais je suis pas Zizi, métèque, ni Franc Maçon, ni Normalien, je sais pas me faire valoir, je baise trop, j'ai pas la bonne réputation... Depuis quinze ans, dans la Zone, qu'ils me regardent et qu'ils me voient me défendre, les plus résidus tartignolles, ils ont pris toutes les libertés, ils ont pour moi tous les mépris. Encore heureux de ne pas être viré. La littérature ça compense. J'ai pas à me plaindre. La mère Vitruve tape mes romans. Elle m'est attachée. « Écoute que je lui fais, chère Daronne, est la dernière fois que je t'engueule!... Si tu ne retrouves pas
Légende, tu peux dire que c'est la fin, que c'est le
de notre amitié. Plus de collaboration ' on confiante!...
de rassis !... Fini le tutu!... Plus d'haricots!... »
Elle fond alors en jérémiades. Elle est affreuse en t Vitruve, et comme visage et comme boulot. C'est vraie obligation. Je la traîne depuis l'Angleterre. t la conséquence d'un serment. C'est pas d'hier qu'on se connaît. C'est sa fille Angèle à Londres qui me l'a fait autrefois jurer de toujours l'aider dans la vie. Je men suis occupé je peux le dire. J'ai tenu ma promesse. C'est le serment d'Angèle. Ça remonte à pendant la guerre. Et puis en somme elle sait plein de choses. Bon. Elle est pas bavarde en principe, mais elle se souvient... Angèle, sa fille : c'était une nature. C'est pas croyable ce qu'une mère peut devenir vilaine. Angèle a fini tragiquement. Je raconterai tout ça si on me force. Angèle avait une autre soeur, Sophie la grande nouille, à Londres, établie là bas. Et Mireille ici, la petite nièce, elle a le vice de toutes les autres, une vraie peau de vache, une synthèse.
Quand j'ai déménagé de Rancy, que je suis venu à la Porte Pereire, elles m'ont escorté toutes les deux. C'est, changé Rancy, il reste presque rien de la muraille et du Bastion. Des gros débris noirs crevassés, on les arrache du remblai mou, comme des chicots. Tout y passera, la ville bouffe ses vieilles gencives. C'est le « P. 0. bis » à présent qui passe dans les ruines, en trombe. Bientôt ça ne sera plus partout que des demi gratte ciel terre cuite. On verra bien. Avec la Vitruve on était toujours en chicane sur la question des misères. C’est elle qui prétendait toujours qu'elle avait souffert davantage. C'était pas possible. Pour les rides,, ça c'est bien sûr, elle en a bien plus que moi! C'est inépuisable les rides, le fronton infect des belles années dans la viande. « Ça doit être Mireille qui les a rangées vos pages! »
Je pars avec elle je l'accompagne, quai des Minimes. Elles demeurent ensemble, près des chocolats Bitronnelle, ça s'appelle l'Hôtel Méridien.
Leur chambre c'est un fatras incroyable, une carambouille en articles de colifichets, surtout des lingeries, rien que du fragile, de l'extrêmement bon marché.
Madame Vitruve et sa nièce elles sont de la fesse toutes les deux. Trois injecteurs qu'elles possèdent, en plus d'une cuisine complète et d'un bidet en caoutchouc. Tout ça tient entre les deux lits et un grand vaporisateur qu'elles n'ont jamais su faire gicler. Je veux pas dire trop de mal de Vitruve. Elle a peut être connu plus de déboires que moi dans la vie. C'est toujours ça qui me tempère. Autrement si j'étais certain je lui filerais des trempes affreuses. C'était au fond de la cheminée qu'elle garait la Remington qu'elle l'avait pas fini de payer... Soi disant. Je donne pas cher pour mes copies, c'est exact encore... soixante cinq centimes la page, mais ça cube quand même à la fin... Surtout avec des gros volumes.
Question de loucher, la Vitruve, j'ai jamais vu pire. Elle faisait mal à regarder.
Aux cartes, aux tarots c'est à dire, ça lui donnait du prestige cette loucherie farouche. Elle leur faisait aux petites clientes des bas de soie... l'avenir aussi à crédit. Quand elle était prise alors par l'incertitude et la réflexion, derrière ses carreaux, elle en voyageait du regard comme une vraie langouste.
Depuis les « tirages » surtout elle gagnait en influence dans les environs. Elle connaissait tous les cocus. Elle me les montrait par la fenêtre, et même les trois assassins « j'ai les preuves! » En plus je lui ai fait don pour la pression artérielle d'un vieil appareil Laubry et je lui ai enseigné un petit massage pour les varices. Ça ajoutait à son casuel. Son ambition c'était les avortements ou bien encore de tremper dans une révolution sanglante, que partout on parle d'elle, que ça se propage dans les journaux.
Quand je la voyais farfouiller dans les recoins de son bazar je pourrais jamais tout écrire combien qu'elle me dégoûtait. A travers le monde entier y a des camions chaque minute qui écrasent des gens sympathiques... La mère Vitruve elle émanait une odeur poivrée. C'est souvent le cas des rouquines. Elles ont je crois, les rousses, le destin des animaux, c'est brute, c'est tragique, c'est dans le poil. Je l'aurais bien étendue moi quand je l'entendais
causer trop fort, parler des souvenirs... Le feu au cul comme elle avait, ça lui était difficile de trouver assez d'amour. A moins d'un homme saoul. Et en plus qu'il fasse très nuit, elle avait pas de chance! De ce côté là je la plaignais. Moi j'étais plus avancé sur la route des belles harmonies. Elle trouvait pas ça juste non plus. Le jour où il le faudrait, j'avais presque de quoi en moi me payer la mort... J'étais un rentier d'Esthétique. J'en avais mangé de la fesse et de la merveilleuse... je dois le confesser de la vraie lumière. J'avais bouffé de l'infini.
Elle avait pas d'économies, tout ça se pressent très bien, y a pas besoin d'en causer Pour croûter et jouir en plus il fallait qu'elle coince le client par la fatigue ou la surprise. C'était un enfer.
Après sept heures, en principe, les petits boulots sont rentrés. Leurs femmes sont dans la vaisselle, le mâle s'entortille dans les ondes radios. Alors Vitruve abandonne mon beau roman pour chasser sa subsistance. D'un palier à l'autre qu'elle tapine avec ses bas un peu grillés, ses jerseys sans réputation. Avant la crise elle pouvait encore se défendre à cause du crédit et de la manière qu'elle ahurissait les chalands, mais on la donne à présent sa fourgue identique en prime, aux perdants râleux du bonneteau. C'est plus des conditions loyales. J'ai essayé de lui expliquer que c'était la faute tout ça aux petits Japonais... Elle me croyait pas. Je l'ai accusée de me dissoudre exprès ma jolie Légende dans ses ordures même...
C'est un chef d'oeuvre! que j'ajoutai. Alors sûrement on le retrouvera!
Elle s'est bidonnée... On a fourgonné ensemble dans le tas de la camelote.
La nièce est arrivée à la fin, très en retard. Fallait voir ses hanches! Un vrai scandale sur pétard... Toute plissée sa jupe... Pour que ça tienne bien la note. L'accordéon du fendu. Rien ne se perd. Le chômeur c'est désespéré, c'est sensuel, ça n'a pas le rond pour inviter... Ça ramène. « Toi pet! » qu'ils lui jetaient... En pleine face. Au bout des couloirs, à force de bander pour des prunes. Les jeunots qui ont les traits fins plus que les autres, ils sont bien doués pour en croquer, se faire bercer dans la vie. Ça c'est venu plus tard seulement qu'elle est descendue se défendre!... après bien des catastrophes... Pour le moment elle s'amusait...
Elle l'a pas trouvée non plus ma jolie Légende. Elle s'en foutait du « Roi Krôgold »... C'est moi seulement que ça tracassait. Son école pour s'affranchir, c'était le « Petit Panier » un peu avant le Chemin de Fer, le musette de la Porte Brancion.
Elles me quittaient pas des yeux comme je me mettais en colère. Comme « paumé » à leur idée, je tenais le maximum ! Branleur, timide, intellectuel et tout. Mais à présent à la surprise, elles avaient les foies que je me tire. Si j'avais pris de l'air, je me demande ce qu'elles auraient boutiqué ? Je suis tranquille que la tante elle y pensait assez souvent. Comme sourire c'était du frisson ce qu'elles me refilaient dès que je parlais un peu de voyages...
La Mireille en plus du cul étonnant, elle avait des yeux de romance, le regard preneur, mais un nez solide, un tarin, sa vraie pénitence. Quand je voulais un peu l'hun àlier : «,Sans char! que je lui faisais, Mireille! t'as un vrai nez d'homme!... » Elle savait raconter aussi de très belles histoires, comme un marin elle aimait ça. Elle a inventé mille choses pour me faire plaisir d'abord et puis pour me nuire ensuite Ma faiblesse à moi c'est d'écouter les bonnes histoires. Elle abusait voilà tout. Y a eu de la violence entre nous pour terminer nos rapports, mais c'est qu'elle avait mille fois mérité la danse et même que je l'étende. Elle en a convenu finalement. J'étais vraiment bien généreux... Je l'ai punie pour le bon motif... Tout le monde l'a dit... Des gens qui savent...

Gustin Sabayot, sans lui faire de tort, je peux bien répéter quand même qu'il s'arrachait pas les cheveux à propos des diagnostics . C'est sur les nuages qu'il s'orientait.
En quittant de chez lui il regardait d'abord tout en haut
« Ferdinand, qu'il me faisait, aujourd'hui ça sera sûrement des rhumatismes! Cent sous! »... Il lisait tout ça dans le ciel. Il se trompait jamais de beaucoup puisqu'il connaissait à fond la température et les tempéraments divers.
Ah! voilà un coup de canicule après les fraîcheurs! Retiens! C'est du calomel tu peux le dire déjà! La jaunisse est au fond de l'air! Le vent a tourné... Nord sur l'Ouest! Froid sur Averse!... C'est de la bronchite pendant quinze jours! C'est même pas la peine qu'ils se dépiautent!... Si c'est moi qui commandais, je ferais les ordonnances dans mon lit!... Au fond Ferdinand dès qu'ils viennent c'est des bavardages!... Pour ceux qui en font commerce encore ça s'explique... mais nous autres?... au Mois?... A quoi ça rime ?... je les soignerais moi sans les voir tiens les pilons! D'ici même! Ils en étoufferont ni plus ni moins! Ils vomiront davantage, ils seront pas moins jaunes, ni moins rouges, ni moins pâles, ni moins cons... C'est la vie!... Pour avoir raison Gustin, il avait vraiment raison.
Tu les crois malades ?... Ça gémit... ça rote... ça titube... ça pustule... Tu veux vider ta salle d'attente? Instantanément? même de ceux qui s'en étranglent à se ramoner les glaviots ?... Propose un coup de cinéma!... un apéro gratuit en face!.... tu vas voir combien qu'il t'en reste... S'il; viennent te relancer c'est d'abord parce qu'ils s'emmerdent. T'en vois pas un la veille des fêtes... Aux malheureux, retiens mon avis, c'est l'occupation qui manque, c'est pas la santé... Ce qu'ils veulent c'est que tu les distrayes, les émoustilles, les intrigues avec leurs renvois... leurs gaz ... leurs craquements... que tu leur découvres des rapports ... des fièvres... des gargouillages ... des inédits!... Que tu t'étendes... que tu te passionnes ... C'est pour ça que t'as des diplômes... Ah! s'amuser avec sa mort tout pendant qu'il la fabrique, ça c'est tout l'Homme, Ferdinand! Ils la garderont leur chaude pisse, leur vérole, tous leurs tubercules. Ils en ont besoin! Et leur vessie bien baveuse, le rectum en feu, tout ça n'a pas d'importance! Mais si tu te donnes assez de mal, si tu sais les passionner, ils t'attendront pour mourir, c'est ta récompense! Ils te relanceront jusqu'au bout. Quand la pluie revenait un coup entre les cheminées de l'usine électrique : « Ferdinand!

D'un château l'autre

Pour parler franc, là entre nous, je finis encore plus mal que ai commencé... Oh, très bien commencé... je suis né, je le répète, à Courbevoie, Seine... je le répète pour la millième fois... après bien des aller et retour je termine vraiment au plus mal... y a l'âge, vous me direz... v a l'âge!... c'est entendu 1... à 63 ans et mèche, il devient extrêmement ardu de se refaire une situation... de se relancer en clientèle... ci ou là!... je vous oubliais!... je suis médecin... la clientèle médicale, de vous à moi, confidentiellement, est pas seulement affaire de science ni de conscience ... mais avant tout, par dessus tout, de charme personnel ... le charme personnel passé 6o ans? ... vous pouvez faire encore mannequin, potiche au musée ... peut être? ... intéresser quelques maniaques, chercheurs d'énigmes? ... mais les dames? le barbon tiré quatre tringles, parfumé, peinturé, laqué?... épouvantail 1 clientèle, pas clientèle, médecine, pas médecine, il écoeurera !... s'il est tout cousu d'or?... encore!... toléré? hmm! hmm!... mais le chenu pauvre?... à la niche! Écoutez un peu les clientes, au gré des trottoirs, des boutiques... il est question d'un jeune confrère... « oh, vous savez, Madame !.. Madame !... quels yeux! quels veux ce docteur il a compris tout de suite mon cas!... il m'a donné de ces gouttes à prendre! midi et soir !.. quelles gouttes!... ce jeune docteur est merveilleux!... » Mais attendez un peu pour vous... qu'on parle de vous !... « Grincheux, édenté, ignorant, crachotteux, bossu... » votre compte est réglé!... le babil des dames est souverain!... les hommes torchent les lois, les dames s'occupent que du sérieux : L'opinion! une clientèle médicale est faite par les dames!... vous les avez pas pour vous ?...sautez vous noyer! ... vos dames sont débiles mentales, idiotes à bramer? ... d'autant mieux ! plus elles seront bornées, butées, très rédhibitoirement connes, plus souveraines elles sont !... rengainez votre blouse et le reste 1... le reste on m'a tout volé à Montmartre!... tout!... rue Girardon!... je le répète... je le répéterai jamais assez 1... on fait semblant de pas m'entendre... juste les choses qu'il faut entendre!... je mets pourtant les points sur les i... tout!... des gens, libérateurs vengeurs, sont entrés chez moi, par effraction, et ils ont tout emmené aux Puces!... tout fourgué! ... j'exagère pas, j'ai les preuves, les témoins, les noms ... tous mes livres et mes instruments, mes meubles et mes manuscrits!... tout le bazar 1 ... j'ai rien retrouvé!... pas un mouchoir, pas une chaise ! ... vendu même les murs!... le logement, tout!... soldés! ... « Pochetée »! tout est dit! votre réflexion! je vous, entends!... bien naturelle! oh, que ça vous arrivera pas! rien de semblable vous arrivera ! que vos précautions sont bien prises !... aussi communiste que le premier milliardaire venu, aussi poujadiste que Poujade, aussi russe que toutes les salades, plus américain que Buffalo!... parfaitement en cheville avec tout ce qui compte, Loge, Cellule, Sacrifie, Parquet!... nouveau Vrounzai comme personne !... le sens de l'Histoire vous passe par le mi des fesses !... frère d'honneur?... sûr ... valet de bourreau? on verra!... lécheur de couperet? ... hé! hé!
En attendant j'ai plus de « Pachon »... je me suis fait prêter un Pachon pour liquider les ennuyeux, pas mieux!... vous les faites asseoir, vous leur prenez leur « tension »... comme ils bouffent trop, boivent trop, fument trop, c'est rare qu'ils se tapent pas leur 22 23... maxima... la vie pour eux c'est un pneu... que de leur maxima qu'ils ont peur... l'éclatement! la mort!... 25! là, ils s’arrêtent d'être loustics! sceptiques! vous leur annoncez leur 23 !... vous les revoyez plus! ce regard qu'ils vous jettent en partant! la haine!... le sadique assassin que vous êtes! « au revoir! au revoir!... »
Bon!... moi toujours avec mon Pachon je prends soin des amis... ils venaient pour se marrer de ma misère... 22! 23 ! je les revois plus!... mais tout résumé, sans broderie, je voudrais bien ne plus pratiquer... cependant, durer je dois! diabolicum ! jusqu'à la retraite! enfin, peut être?... Pas « peut être » les économies! en tout ! tout de suite! et sur tout !... d'abord le chauffage!... jamais plus de + 5° tout l'hiver dernier! nous sommes certes très habitués !... entraînés! je veux!... l'entraînement nordique! nous avons tenu là haut pendant quatre hivers... presque cinq... par 25 au dessous... dans une sorte de décombre d'étable... sans feu, sans feu absolument, où les cochons moureraient de froid... je dis !... or donc, entraînés nous sommes 1... tout le chaume s'envolait... la neige, le vent dansaient là dedans! ... cinq ans, cinq mois à la glace!... Lili, malade opérée ... et allez pas croire que cette glacière était gratuite! pas du tout!... confondez rien!... j'ai tout payé! les notes sont là, et signées par mon avocat... certifiées par le Consulat... ce qui vous explique que je suis si raide! ... pas seulement du fait des pirates de la Butte Montmartre ... les pirates de Baltique aussi!... les pirates de la Butte Montmartre voulaient me saigner que mes tripes dégoulinent la rue Lepic ... les pirates baltiques eux voulaient m'avoir au scorbut ... que je laisse mes os en leur prison la « Venstre »... c'était presque... deux ans en fosse, trois mètres sur trois!... ils ont alors pensé au froid... aux tourbillons du grand Belt... on a tenu 1 cinq ans et payés! ... en payant 1 j'insiste 1 vous pensez, mes économies ! ... tous mes droits d'auteur!... partis petits! aux tourbillons!... plus les saisies du Tribunal!. .. la rigolade que ce fut! oh, j'avais un petit peu prévu!... une petite lueur !... mon complet, l'unique, je le garde, est de l'année 341 mon pressentiment!... je suis pas le genre Poujade, je découvre pas les catastrophes 25 ans après, que tout est fini, rasibus, momies!... je vous raconte pour la rigolade cette prémonition 341... que nous allions vers des temps qui seraient durs pour la coquetterie... j'avais un tailleur avenue de l'Opéra... « faites moi un complet, attention! spécial sérieux!... Poincaré 1 supergabardine ! le genre Poincaré ! »
Poincaré venait de lancer sa mode! sa vareuse! une coupe vraiment très spéciale... je fus servi!... le complet, je l'ai là... toujours inusable 1... la preuves! il a tenu à travers l'Allemagne... l'Allemagne 44... sous les bombardements 1 et quels! et à travers les quatre années... de ces bouillabaisses de bonshommes, incendies, tanks, bombes 1 de ces myriatonnes de décombres! il a un peu décoloré…

 

dictionnaire céline

L'objectif de ce travail est de restituer l'ensemble des usages de la langue de Céline à partir de son lexique. Il a également pour but de tisser un réseau de références en matière de critique célinienne quand celle-ci s'interroge sur la langue. La présente version ce projet n'en est qu'à son début. Elle sera complétée le plus régulièrement possible. Bientôt, un moteur de recherche permettra d'accéder directement à la définition d'un mot et à ses occurrences.

Ce travail part du principe selon lequel on ne peut comprendre l'oeuvre de Céline que si l'on se penche sur les notions les plus évidentes de la lecture, à savoir la compréhension des mots qui forment une syntaxe elle-même particulière, au service d'un style qui souvent manie l'ellipse et le sous-entendu. Cette dimension de la lecture, évidente pour beaucoup, l'est moins pour ceux qui parlent une langue maternelle autre que le français. C'est essentiellement à eux qu'est destiné ce dictionnaire qui regroupe l'ensemble des néologismes et des termes argotiques les moins connus aujourd'hui.

Je me réfère, chaque fois que possible, à l'édition de la Pléiade, qui comprend à ce jour quatre volumes (on annonce un cinquième de correspondance pour dans quelques années). Il est bien entendu que le Vocabulaire populaire et argotique de Catherine ROUAYRENC de chaque volume, quoique lacunaire, constitue la référence principale. Toute reprise est indiquée comme telle. Autre ouvrage utile : le Dictionnaire du français non conventionnel paru chez Larousse, et dont Alain Rey est l'un des rédacteurs. Un travail systématique permettra, d'ici quelque temps, de multiplier les références aux études déjà publiées (notamment celles de A. Juilland, de l'Université de Stanford).

 

a   b   c   d   e   f   g   h   i   j   k   l   m   n   o   p   q   r   s   t   u   v   x   y   z

 

A

 

ABIBOCHER (S') vb. pron.
 Néologisme formé à partir de rabibocher (réconcilier quelqu’un avec quelqu’un d’autre). Signifie dont se lier d'amitié. Le glossaire de la Pléiade indique qu'en emploi transitif, veut dire également 'mettre en état'.
‘Se mettre bien avec la mort, qu’elle leur fasse pas de mal à eux, leur cher ‘eux’, le moment venu… leur moment… s’abibocher avec elle !…’ FI, 11.
'Ça m'abiboche pour La Villette.' Pléiade IV, App. II, 616.
*
 
ABÎMER vb. tr.
D'après le glossaire de la Pléiade IV, maltraiter quelqu'un en paroles.
 'Il m'a abîmé, hein ? Jules ?' FII, 183.
*
 
ACHARNERIE n. f.
 Néologisme à partir de acharnement.
 'Une acharnerie d'intempérie! rarissime!' F1, 17.

*

AC(C)RÉ interj.
 Attention ! Sans doute apocophe de sacré comme premier mot d'une interjection.
' [...] accré ! le mec se montre' N, 468.
' 'Acré !...' que je crie à Sosthène...' GB II, 324.
'Acré, filez doux !' Pléiade IV, App. III, 787. 

*

ACROSTICHE n.m.
 Nom utilisé dans le sens de digression à partir de accroc, ou anicroche. Voir note Pléiade IV, 1223.
 'Je vais vous parler de Marc Empième ... encore une petite acrostiche!' F1, 20.

*

AFFILE (D') loc. adv.
 D'affilé.
 'Trois mille deux cents places, plus un strapontin des dix mois d'affile...' Pléiade IV, App. III, 727.

*

AFFRANCHI adj.
 Mis au courant. Voir affranchman.
 'C'était des mensonges, c'était de l'infecte injustice... Je le sentais nettement. Car j'étais affranchi! Ces salades puantes c'était pour que je bosse à l'œil!... Il profitait de mes parents.. Qu'ils pouvaient encore me nourrir.. Il dépréciait mon boulot pour me faire marner gratuitement.' MàC, 149 (Folio) 

*

AFFRANCHIR vb. tr.
 Mettre au courant. 
'Je vais les affranchir un peu...' Pléiade IV, App. III, 727.
'Restif, il n'attendait que le moment, [...] pour nous affranchir' R, 804.
*
 
AFFRANCHMAN n. m.
 Néologisme à partir de affranchi (mis au courant) avec suffixation empruntée à l'anglais : celui qui connaît le dessous des choses. Henri Godard, dans la lecture qu'il fait de Mort à Crédit, prend le terme 'affranchi' au pied de la lettre, alors que tout laisse à penser le sens demeure le même dans le différents textes. (Henri Godard commente Mort à crédit de Louis-Ferdinand Céline, Paris : Gallimard, coll. Foliothèque, 1996).
 Alors vous rierez pas : au fol! Affranchman!' F1, 18 (comprendre 'vous crierez pas : au fol! [mais au contraire] affranchman!') ;
'Et que ça se prétend affranchman !' GB I, 131.

*

AFFUR n.m.
 Néologisme à partir de affaires. Entreprise rentable, qui produit des bénéfices. Par glissement, butin.
 'Ça fait que jouir et pleurnicher... tout afur ! jamais paumé !...' F2, 220.
'Et surtout adroit le nain aux cartes !... SOn vrai afur !' GB I, 246.
'Deux trois martingales j'en suis sûr, résistances, collabos, Vichy, tous les afurs, pensé à tout' Pléiade IV, App. III, 705.
' [...] rapines des démons à cuirasses [...] l'afur de sept dynasties' DCL 113.

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AFURER vb.
 Néologisme à partir de affur, lui même formé à partir de affaires.
1. Vb. transitif : préparer, organiser..
 '- Toi, cher Ferdinand, viens ! écoute ! / Je me méfie... qu'est qu'il m'afure ?' FII, 465.
'Ils affurent un vilain coup' GBII, 623.
2. Vb tr. et pron. : se procurer.
'On avait affurer ce dingue, tout ce matériel' GBII, 644.
'Fallait que je m'affure quelque chose !...' GBII, 568.
3. Affurer quelqu'un sur quelque chose : diriger quelqu'un sur une affaire.
'Il m'affure sur un petit turbin' GBII, 493.

*

AGAGA adj.
 Néologisme à partir de gaga. Gâteux.
 'Tout agaga comateux qu'il avait l'air' Pléiade IV, 646.

*

  AGGRAVER vb. tr.
 Utilisé avec un double c.o.d. Augmenter.
 'Celui-là il m'aggrave la douleur!' F1, 35. 

*

AGONIQUE n.m.

 Néologisme désignant une personne à l'agonie.
 'Plus que morfondus, suicidaires, à moi !... à la renourriture ! agoniques !...' F1, 69.
*
AÏ pron.
 Orthographe francisée de I, je en anglais.
 ' 'Aï love you !'... que je lui crie !... c'est du Shakespeare !...' F1, 95.

*

AIR (JOUER L') loc. vb.
Ellipse de jouer la fille de l'air. S'enfuir.
'Il ne s'agit pas [...] que nos demoiselles nous jouent l'air' N, 392.
*
 
ALIBIGE , interject.
Néologisme partir de alibi, celui qui cherche de faux alibis pour se sortir d'une situation embarrassante.
'Faux-fuyeux! Trouilleux! Alibige! mauvaise foi! cochon!' F1, 36.
*
 
ALOYAUX (COMPTER SES) loc. vb.
Risquer sa vie (Glossaire Pléiade III).
'Compter ses aloyaux au fond de toutes les sapes' GBI, 136.
*
 
ALTRUERIE n.f.
Néologisme à partir de altruisme; avec influence certaine du verbe dynamique se ruer, qu'on retrouve un peu plus loin dans le paragraphe, et de tuer.
'Je suis parti par pure gentillesse, chevalerie atrurie voisine! vérité!, que personne soit cruxi pour moi!', F1, 45.
*
 
AMOURERIE n.f.
 Néologisme, désigne l'acte amoureux, et plus particulièrement les bruits produits lors de celui-ci.
 'Plus le chœur des gourmets de la nuit qu'était couvert encore lui-même par la bacchanale animale, éventreries, égorgeries, amoureries de vingt-cinq zoos !' F1, 98.
*
 
ANGLE (dans ‘fasciner d’angle’)
 Regarder de biais. Voir guigner
 ‘Ils me regardent de biais… les plus décidés sont gênés, là, au moment… ils sont complices. Ils ont l’âme bouchère… Je les fascine d’angle’ FI, 10.

*

ANGLOSLANGUE n.m. 
Néologisme par association de anglo, de slang (argot en anglais), de slave et de langue.
'Bientôt vous pourrez plus râler en propre [en français]... faudra que vous empruntiez au volske, au syrioperse, à l'angloslangue.' F1, 119.
*
 
ANGULEUX , adj.  
Peut-être pour anglais, ou plus vraisemblablement qui regarde de biais, qui n'est pas franc.
'Et troulecteurs de romans russes, filandieux, anguleux, mériqueux, plagieux, anti-vous ! vous dégueulerez vos trahisons !' F1, 81.
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ANU n.m.
Pour anus.
'La vérité !... plein dans les souvenirs de famille !... l'anu de maman si il ressemblait ?' F1, 116.
'- Dieu présent ! Dieu toi ! Cul ! Anu !... (...) vous deviendriez saint pour un rien... d'une goutte de sang de moins de trou anu !' F1, 117.
*
 
APOLOCHE n.f.
Néologisme, déformation d'apologue. Le glossaire de la Pléiade indique que le mot apparaît plus souvent chez Céline sous la forme poloche. Histoire, et par glissement de sens, affaire.
'Mais tout le monde connaît l'apoloche, c'était à qui le ferait grimper' Pléiade IV, App. II, 645.
'T'as pas compris l'apoloche ?' GBII, 641.
*
 
ARAMON n.m.
Vin ordinaire.
'Le vin blanc, l'aramon poisseux' Pléiade III, App. CP, 70.
*
 
ARAVION , n.m.
Néologisme. Il faut se référer à la très bonne note de la Pléiade (IV, p.1245), que nous citons intégralement : 'Peut-être ne faut-il pas voir dans aravion du javanais. En effet, seule la séquence ar pourrait être considérée comme un infixe devenu préfixe. Or, les seuls infixes fréquents, qu'emploie d'ailleurs Céline, sont av et ag. A. Delvau dans son Dictionnaire de la langue verte (1866) signale bien que 'Les voleurs ont aussi leur javanais, qui consiste à donner des terminaisons en ar et en or, en al ou en em, de façon à défigurer les mots, soit français, soit d'argot en les agrandissant', mais ici ar serait préfixe et non suffixe. On pourrait évidemment arguer de l'inventivité de Céline qui ne recule pas devant le néologisme. Toutefois, il semble que l'on puissse y voir un mot-valise, combinant aréo et avion. Aréo est attesté par G. Esnault dans Le Poilu tel qu'il se parle (1919) comme un mot d'usage général de 1914 à 1917 pour désigner les avions.
'Quand la rage est dans les cieux (fallait entendre les aravavions!)' F1, 44.
' 'Des aravions de qui qu'ils sont ?...' ' F1, 148.
'Il voudrait (...) que les avions crèvent la Butte...' FII, 216.
*
 
ARCAGNER vb. tr.
Néologisme à partir d'arcagnats, règles menstruelles, mettre en sang (glossaire de la Pléiade).
'Plumé, d'autres plumes ! le sang avec ! Bourlingué, arcagné, drossé' Pléiade IV, F1, 126.
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ARCAGNES n.f.pl.
Néologisme à partir d'arcagnats, règles menstruelles.
'T'aurais pas tout ce rouge-là goulu ! du foutre ? des arcagnes ? qu'est-ce que c'est ?' F1, 126.
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ARCHINU p.p adj.
 Complètement nu.
 'Vous êtes comme projeté archinu !' F1, 110.
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ARCHICROUNI adj.
 Néologisme à partir de crounir, mourir.
 'Que crouni, archicrouni, papyru, dans le fond de votre cercueil, vous vous soulèveriez du trou' Pléiade IV, App. IV, 882.

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 ARDOISER vb. tr.
 Néologisme sémantique à partir de ardoise, sur laquelle sont notées les comptes des clients dans les cafés. Faire les comptes.
 'J'en suis de l'Histoire, j'ardoise des horreurs !' F1, 43.
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ARLOQUES n.m.
 L'édition de la Pleiade IV (1427) consacre une note à ce néologisme à la construction incertaine : 'Le mot, qui est clairement lisible dans le manuscrit, pose problème. On peut y voir peut-être un dérivé d'arlequin, terme d'argot appary chez Vidocq en 1829 et qui désigne un ensemble d'aliments disparates, reliefs de grands restaurants, vendus au rabais ; après avoir été apocopé, arlequin aurait reçu le suffixe -oque que l'on trouve dans pédoque ou probloque'. Objets de rebus.
 " -J'en veux pas de ton ustencile ! Ils me foutent les arloques.' Pléiade IV, App. II, 655.
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ARNAQUIER n.m.
Néologisme, ou plutôt déformation de arnaqueur, sans doute sous l'influence de banquier, argentier,... Exploiteur.
'Les pires arnaquiers de la misère' GBI, 259.
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ARQUER vb. intr.
Argot. Marcher.
'Je vais arquer, je vais me remettre debout !...' FII, 431.
'Il arquait de biais comme un crabe' GBII, 351.
'Eux qui arquaient vaseux cloportes maintenant je les vois presque agiles' R, 878.
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ARRONDIR (POUVOIR SE) loc. vb.
D'après la Pléiade IV, signifie par métaphore se préparer inutilement. La note (1353) cite Chautard (La Vie étrange de l'argot), qui indique que l'expression évoque l'anus. En général employée avec pouvoir, pour indiquer le refus, comme dans tu peux courir.
'-Viens chierie !... viens ma douce amour ! Je peux me l'arrondir !... zébi !... elle trisse !' FII, 481.
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ARSOUILLE n.f.
Argot. Voyou.
'Harras verrait s'il revenait, sacré farceur [...] arsouille' N 495.
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ARSOU n.f.
Néologisme. Apocophe de arsouille. Crapule.
'Minute ! arsou !' FII, 302.
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ARTA interj.
Néologisme. Apocophe de artagada.
'Ceux qui savaient se sauvaient ! Arta !' F1, 140.
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ARTAGADA interj.
Le Vocabulaire populaire et argotique (IV) indique que ce néologisme vient probablement de tagada, 'en avant' qui, d'après le DFNC est formée à partir d'une onomatopée imitative du galop d'un cheval ou d'un roulement de tambour. Peut aussi désigner le postérieur.
'Pas lambinant je vous assure, poulopiers ! Artagada ! Artagada ! ' FI, 93.
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ARTICHER vb. tr.
Néologisme à partir d'artiche, porte-monnaie. Voler
'De penser qu'on m'artiche, je blêmis...' FII, 326.
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ARTIFLOT n.m.
Artilleur.
'Tiens, quelqu'un ! [...] un artilleur [...] notre artiflot' R 813, 814.
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ASPOUINER vb. tr.
Néologisme, sans doute à partir de jaspiner, parler (glossaire Pléiade IV).
'J'entends votre question... Nenni que j'aspouine!' F1, 40.
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ASSASSER vb. tr.
 Néologisme à partir de assassiner.
 'J'en ai connu au moins douze, des vierges merveilleuses et musclées, et des apollons de lycée qui voulaient m'avoir à l'extase, que je leur fasse toutes les privautés, la veille qu'on m'assasse' F1, 18.

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ASSASSINER (S') vb. pronominal.
 Néologisme signifiant logiquement se suicider.
 'Il se taillait dans la radiale à grands coups de fourchette... et puis il s'attaquait la cuisse sous la couverture... il s'assassinait... ' F1, 38. 

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ASTIBLOCHE n.m.
Néologisme. Asticot, utilisé dans le premier exemple comme terme péjoratif et affectif, sans doute en rapport avec le verbe asticoter, du moyen français dasticoter, parler l'allemand, de l'allemand dass dich Gott ! que Dieu te damne !, et signifiant taquiner quelqu'un jusqu'à l'énervement. Dans le second exemple, les asticots indique bien sûr le lieu où pourrissent les cadavres.
'La preuve n'est-ce pas les astibloches.' Pléiade VI, App. VI, 985.
' [...] encore longtemps après décès, ma mise très humble aux astibloches.
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AT(T)IGER vb. tr.
(Nous citons intégralement les entrées de la  Pléiade II, III et IV)
1. Sous forme participale, blessé, invalide.
'Je lui fais voir ma main moi aussi [...] qu'on est attigés tous les deux' GBII, 675.
'Des légionnaires, des coloniaux, tout ça attigés, banbans' Pléiade IV, App. IV, 906.
'Je remus plus... je gémis sous le tas... mes côtes ! pardon ! [...] et ma tête ?... y en a de plus attigés que moi... certes' FII,
2. Bousculer, malmener ; discréditer.
'Comment mes femmes ! [...] Ça m'atige maintenant ?' GBI, 135.
'Ça faisait une coquine d'impression, ça m'atigeait un peu plus' Pléiade IV, App. III, 787.
3. Exagérer.
'Ah ! là je ressaute !... il attige !' GBII, 423.
'Il attige' N 623.
4. Attirer, par contamination sémantique d'une autre acception d'attiger, accroître, par le signifié du paroxysme attirer qui se retrouve d'ailleurs dans le contexte.
'On en reparlera du charme de Jules !... charme criminel ! qu'il nous atige toutes les charges ! du fond du ciel !' FII, 210.
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ATOUT n. m.
 D'après la Pléiade IV, 'coup reçu'.
 'Vous sentez plus grand-chose après quinze, vingt atouts très durs...' F1, 49. 

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ATTELER vb tr.
D'après la Pléiade IV, 'faire travailler à son profit une ou plusieurs prostituées'.
'Il attelait à ma connaissance au moins douze souris' GBII, 435.
'Qu'il avait un certain condé pour ses manières avec les filles, qu'il en attelait par-ci par-là, ue sa femme était au courant.' Pléiade IV, App. II, 650.

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ATTOUCHERIE n.f.
Néologisme à partir de attouchement.
'Je les ferais avouer leurs compromis, leurs attoucheries !' F1, 89.
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AUBER n.m.
Argent.
'Il aurait pu se faire du pognon, lui pourtant affreux pour l'auber' GBI, 191.
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AUTOR (D') loc. adv.
Néologisme, abrègement de autorité, de sa propre initiative, sans hésiter, sans discussion.
'Sosthène d'autor déploie ses plans' GB II, 315.
‘Le môme il oserait pas me buter, là tout de go ! d’autor et plaff !’ F I, 7.
'Qu'il les insultait d'autor !...' F1, 144.
Hist. - 'Fonçons d'autor et d'achar' pour d'autorité et sans doute avec acharnement. Les deux formes sont employées depuis 1830 et le sont concurremment jusqu'aux années 1910 (DFNC).

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AVARO n.m.
 Néologisme. D'après la Pléiade IV, dérivé d'avarie avec suffixation en -o, signifiant difficulté.
 'Le livre qui vous réjuvène l'âme, boyaute le boyau ! poudroie les soucis !... humeurs, avaros ! avaries !...' F1, 111.
*
 
AVARO n.m.
 Néologisme à partir de avarie, avec suffixation en -o. Du reste, avarie est cité juste après dans le passage ci-dessous.
 'Le livre qui vous réjuvène l'âme, boyaute le boyau ! poudroie les soucis !... humeurs, avaros ! avaries!...' F1, 111. 

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AVERSEUSE adj.
 Néologisme pour pluvieuse à partir de averse.
 'Une année averseuse unique', F1, 17.
retour au debut du dictionnaire

 


B

BABA n.m.
Argot.
1. Derrière.
'Vous prenez tout, vous, dans le baba !' FII, 309.
2. L'avoir dans le baba : être dupé.
'Ils l'ont dans le baba, les potes !... il sautera jamais !...' FII, 206.
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BABOUILLI n.m.
Néologisme à partir de babiller, tenir des propos puérils, avec croisement possible de bafouillis (pour bafouillage) et de bouillie. Influence possible de babil, bavardage continuel, enfantin ou futile. A mettre en rapport avec la haine qu'entretenait Céline pour la sentimentalité.
'Plutôt vingt consultations qu'une visite sentimentale... La haine que j'ai du babouilli' FI, 18.  

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BADIGOINER vb. tr.
Néologisme. Le glossaire de la Pléiade IV nous informe qu'il s'agit d'un croisement de badigeonner et de badigoinces, lèvres. Ce dernier mot est utilisé par Rabelais. Cependant, il semble que des deux mots, ce soit le premier qui prédomine pour le sens.
'Ils s'en badigoinent les rectums' Pléiade IV, App. III, 830.
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BAGOTIER n.m.
Argot. Celui qui fait des 'bagots', porteur occasionnel de bagage (DFNC), et par extension celui qui se déplace rapidement. Utilisé depuis la fin du XIXeme siècle.
'Lui le bagotier ! le coureur au motif comme pas !...' FI, 134.
*
 
BAGOTTE  (ETRE A LA)
Marche à pied.
'Reste couché, moi à la bagotte' Pléiade IV, App. IV, 898.
*
 
BAGOTTER vb. intr.
Marcher.
'On bagottait depuis le matin' Pléiade IV, App. III, 692.
*
 
BAHUTER vb.tr.
Néologisme apocope à partir de transbahuter, transporter. À noter que le bahut désigne au Moyen Âge un coffre où l'on rangeait ses vêtements. Par glissement, et à partir de l'idée de voyage, le mot a finit par signifier de son côté la notion de transport, de déplacement d'un lieu à l'autre.
'Pendant qu'ils me bahutent ! cahotent !' FI, 90.
'Vite la civière !... tout seul deux pas je croule... qu'ils me bahutent comme à la brouette !...' F1, 100.
*
 
BAHUTERIE n.f.
Néologisme à partir de bahuter. Secousse.
'Ces bahuteries de mines... la Butte est plus qu'un cratère en pleine éruption !' FII, 189.
*
 
BALAN n.m.
Voir ballant.
*
 
BALAYETTE n.f.
Explusion, à partir du mouvement de l'objet expulsant la poussière.
'Ah ! ces balayettes... On tenait deux trois jours pas plus... on nous remerciait...' Pléiade IV, App. III, 701.
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BALLANT (ou BALAN) n.m.
Régionalisme. Elan, oscillation. La note de la Pléiade IV (1346) indique que 'Céline emploie ballant avec le sens qu'a balan, terme régional attesté selon le Trésor de la langue française en Haute-Loire et dérivé de balancer. L'orthographe ballant s'explique par analogie avec le mot de français strandard ballant, 'balancement'. D'ailleurs, Céline utilise également la graphie balan, notamment dans FII, 258 et dans MaC, 961.'
'Il me charge !... il prend un ballant du pied ! il me shoote !' FII, 399.
*
 
BALLE n.f.
Abbréviation de peau de balle, c'est-à-dire rien.
'La façon qu'ils abîment votre oeuvre, la détestent, s'en torchent, comprennent balle' FII, 326.
*
 
BALLON (FAIRE) loc.vb.
Etre privé de nourriture ; par extension, être privé d'une chose due (glossaire de la Pléiade IV).
' '- [...] J'ai fait ballon avec toi.' / Il y revenait sur sa dette' Pléiade IV, App. 655.
*
 
BALLOTTE n.f.
Néologisme à partir de ballotter. Actiond e basculer, de jeter comme un balot.
'On s'élancerait tous à l'assaut ! et à la ballotte !... au feu ! au feu !...' FII, 247.
*
 
BALPEAU interj.
Verlan pour peau de balle : rien.
'Ils se tâtent... balpeau !' FII, 372.
'Je vous disais que c'était fini ! balpeau !... ça retombe plutôt pire !...' FII, 376.
*
 
BANBAN adj. m.
Boiteux.
'Invalide, banban...' Pléiade IV, 684.
*
 
BANQUEROQUE n.f.
Néologisme à partir de banqueroute et, sans doute, d'escroquer.
'Las ! je faille ! Banqueroque !Toute cette prison vaine !..' FI, 89.
*
 
BARADABOUM onom.
 Néologisme à partir de badaboum.
 Ce baradaboum! la charge à la cellule du chnoc!' F1, 36.
 

*

BARAGOUINERIE, n.f.
 Néologisme à partir de baragouin. Rappelons que ce mot est déjà le croisement de deux substantifs bretons (bara, pain, gwin, vin), et qu'il désignait une langue incompréhensible et surtout interdite aux élèves des écoles de la République.
 'Moi l'horreur des langues étrangères !... biaiseuses baragouineries infirmes !... C'est l'humiliation capitale !' F1, 84.
*
 
BARATE n.
 Néologisme à partir de barat, qui en ancien français signifie tromperie, marché frauduleux, propos mensongers. Le verbe est barater, puis résurgence au xxieme siècle sous la forme baratin (Dictionnaire du français conventionnel).
 'Juste les faits ! Pas de coups de barate !...' F1, 103.

*

 

BARBOUILLURE n.f.

Néologisme à partir de barbouiller, s'enduire d'une substance qui salit (DHLF).
'Ah ! barbouillure !... crapaud sur le flanc !' F1, 150.
*
 
BASCULER vb. tr.
 Désigne la mise en place des brimades imposées par les 'anciens' aux nouveaux soldats à leur arrivée, à partir du vocabulaire de la guillotine. La bascule permet de mettre le corps du condamné en position horizontale.
 'Ah, je me voyais rajeuni! le 'bleu' qu'on bascule!' F1, 35.
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BÉER vb. intr.
 Au futur, pour rester bouche bée.
 'Vous en béerez demain !...' F1, 81. 

*

BELLEMENT adv.
'Je vous aurai bellement prévenu !...' F1, 111.
 

*

 BÉNOUSE n.m.
 Argot. Pantalon.
 'Ils lui tirent tous sur son bénouze !... me pisser dessus !...' F1, 94.
 

*

BIAISEUSE n. et adj. f.
 Néologisme à partir de biaiser, qui n'est pas franche.
 'Moi l'horreur des langues étrangères !... biaiseuses baragouineries infirmes !... C'est l'humiliation capitale !' F1, 84.

*

 

BIBIBIBIBICI acronyme.
 Néologisme, transformation de BBC; voir BIBICI ; la multiplication de la syllabe rend ridicule le nom de cette station de radio faisant partie de la mythologie de la Résistance ; à noter qu'à travers elle, Céline dénonce les appels à la vengeance et au meurtre contre les forces nazies et leurs alliés.
 'Ah bibibibibici! the question! Une ordonnance? un baiser? un petit service!' F1, 24. 

*

BIBICI acronyme
Néologisme orthographié comme subst., à partir de BBC. Voir bibibibici.
'C'est du Bibici plus garce!' F1, 25. 

*

BIFTEKER vb. tr.
 Néologisme à partir de l'anglais bifteck, chair, et par extension prostituée : se faire le souteneur d'une prostituée.
 'Revenu à la vie naturelle il bifteckait deux trois cocottes...' F1, 74.
 

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BIGLOUSEUR n.m.
 De ‘bigler’, c'est-à-dire regarder avec curiosité ou envie (Gd usuel Larousse).
 ‘La tragédie je vais vous dire je devrais déjà être assez loin… en Laponie… au Portugal… dès les premières visites ‘voyeuses’… les premiers biglouseurs de biais…’ FI, 10.
*
 
BIGNOLE ou BIGNOLLE adj. et nom.
Argot (l'orthographe bignole est plus courante chez Céline, surtout dans Mort à Crédit) à partir de bigner, 'regarder en dessous, espionner' (DFNC). Femme concierge.
Adj. :'C'est un peu tous les ateliers.. ça sort, ça rentre... c'est mouche, c'est bignolle... c'est au ragot, c'est à la fesse, c'est à la fiche...' F1, 129.
Nom : 'Toujours plein de curieux à ses fenêtres... bobines, massacres, pipes, demi-lopes, touristes, bignolles...' F1, 133.
*
 
BIGNOLER v.int.
Argot. Épier, regarder avec indiscrétion, guetter (DFNC). Le même dictionnaire ne se prononce pas sur une antériorité du verbe sur le substantif, tout en notant que ce dernier est beaucoup plus usuel.
*
 
BLABLA
 'Oh voyez pas d'atrocités, d'intentions inhumaines ! blablas ! c'est l'hiver le vent la violence !'
F1, 49.
 'Employés partout nom de Dieu! blabla catastrophes tant par mois' F, Version B, 711.
 'Blabla chéris ! Alors ? Alors ? Verdict et hop !' F1, 104.

*

 

BLABLATER vb. int.
 Néologisme, à partir de blabla. Se perdre dans des considérations frivoles.
 'Oh ma longanimité ! que je blablatte à m'éclater ? blablatte à migraines pour cent ans ?' F1, 104.
 

*

BLABLATISÉ p.passé.
 'Sloganisé, blablatisé, glotte au croupion, rabâcheur d'étronimes sottises, méchancetés lâches, délations folles, cacatoïsé plus et plus !' F1, 109.
 

*

BLÂÂÂ
'Si ils se trouvaient blâââ !... déconfits...' F1, 140.
*
BLAKBOULÉ, part. passé.
L'édition de la Pléiade IV (1248) consacre une note à ce mot : 'signifie rejeter, repousser, dans un vote, par un emprunt à l'anglais to blackball, mettre dans l'urne noire'. Céline redonne ici son caractère concret à la boule que le français a déjà réintroduite dans le forme même du mot. Le prisonnier, dans la cage, est rejeté d'un mur à l'autre comme une boule'.
 'Happé, blackboule ! (je vous parle de la cage)', F1, 49. 

*

BLAVOUILLER vb intr.
 Néologisme. Parler à tort et à travers. À partir de 'blaver', lequel est formé de blablater et de baver, bavarder.
 'Oh mais je digresse pas du tout! Ne croyez pas que je blavouille!...' F1, 17. Variante du manuscrit : 'que je [godouille] blavouille!'

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BLÈCHE adj.
Argot. Une vieille, misérable. Forme substantivée de l'adjectif.
'C'était pour une blèche, une crachante !... une juste sortant de l'hôpital, pas guérie...' F1, 142.
HIST.- Le DFNC donne pour origine probable de ce mot la forme normande de l'ancien français blecier (amollir en battant). 'Au XVIIe siècle, précise-t-il (90), [le mot] s'emploie à la fois pour des objets (blet de même racine, 'talé' pour un fruit) et pour les personnes, métaphoriquement ('mou', faible de caractère, peu sûr, sournois).
 'J'omettais l'âge... notre âge! grossesse? grossesse? grand-mère plutôt! blèche! Comme moi!' F1, 24.
 

*

BLÉCHIR vb. int.
Argot. Vieillir.
'Ah ! mûrir encore ! bléchir plus ! blets, plus blets !... s'oublier sous eux...' F1, 80. 

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BOBICHER (SE) vb. pronominal, à ne pas confondre avec le verbe bobicher.
 Néologisme. Croisement de bobo, bichonner et bicher : prendre soin de soi, se soigner.
 'C'est donc très juste qu'il se bobiche, gâtelotte, se refuse rien, chasses yatchs, castels' F1, 20. Voir note de la Pléiade, p.1223, et Voc.

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BOMINER vb tr. 
Néologisme après chute de 'a', et avant substantivation. Le verbe comme le nom se trouvent ici tronqués en raison d'un bégaiement :
'Ah si vous saviez les Berbères si on les bomine cette année! Ah, bo! bo! bo! bo! cher Maître! Ah, c'est effroyable! tenez que la ba! ba! ve! me sèche! Mi! mi! Mina! Bobo! Nable' F1, 41. Il s'agit ici d'une mention aux événements d'Algérie.
*
 
BOSCO, n. et adj.
 Bossu. D'après le Dictionnaire du français non conventionnel, l'origine de ce mot, attesté pour la première fois en 1808, est incertaine, surtout en ce qui concerne la présence de la consonne c.
 'La langue française est royale ! que foutus baragouins autour ! conjurés ! boscos, vérolés !...' F1, 82 ;
 'Ça a dû être abominable la déblatération de ce pitre ! bosco cul-de-jatte jaloux venin' FII, 183.

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BOUFFRE Voir OUFFRE

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BOUILLUS ou BOUILLUZ n ou adj. m. pl.
 'Toujours des bourreaux dans Paris ! toujours des tronchus, des branchis, des estrapadés ! des bouillus ! juste savoir de quelle secte vous êtes ? ' F1, 48 ;
 'Je vous retrouverai ! les tanks vous ayant laminé, hachuré, les napalms bouilluz, je vous retrouverai !' F1, 79.

*

 

BOUMER, REBOUMER
 1. Aller bien, à partir de l'anglais boom, puis de l'expression familière ça boume.
'Admettant que Féerie boume' Pléiade IV, App. IV, 876 ;
 'Je suis avec ceux qui réédifient, reboument les Cités (...) la valse des millions ! Je reboume riche ! que les librairies savent plus quoi faire... ' F1, 60 ; F1, 71;
' Si je reboume en dépit des haines, des crachiblablas des Artrons !...' F1,120.
 2. Heurter, à partir de boum.
'Bébert [...] fonce dans le couloir *boume* les portes, le battant...' Pléiade IV, App. III, 710 ;
 'Mon bagnard voisin!... simple, il se lance dedans tête première! Braoum ! et il recommence ! Il rebeugle ! et reboume !...'

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BOUROUETTE ou BEROUETTE n.f.
 Déformations de  brouette.
 'J'aurai tant prié pour des dattes ? et bahuté ? souffert immonde? Bourouette ! bourouette ! Ah, heureusement que je colle au fond ! (...) Ils recommencent tout !... Ils m'arrachent de mon tabouret ! 'Blasphémateur ! aux endives !... La bourouette, charogne !' ' F1, 92.
 'Je suis plus qu'un tas une gélatine à fond de borouette ! (...) 'Je vois le môme Bartre et la petite Elsa... du fond de ma borouette !' F1, 93.

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BOUZILLERIE n.f.
 Néologisme à partir de bouziller, détruire.
 'Je pense à la bouzillerie totale ! au derniers jours, aux phosphores !...' F1, 59.

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BOUZILLMAN, n.m.
 Néologisme à partir de bouziller, détruire, avec suffixation pseudo-anglaise.
'Je mérite d'être traité effroyable... ce que j'ai saccagé ! bouzillman !...' F1, 69.
*
 
BOYAUTER vb. trans.
 ' 'Acheter Féerie ! achetez Féerie ! le livre qui vous réjuvène l'âme, boyaute le boyau !' F1, 111. 

*

BOYAUTERIE n.f.
 'Foi ! je vous retrouverai ! mon point d'honneur ! même plus que déchiqueture pourrie ! boyauterie bleue, bidoche à rire, je vous retrouverai !' F1, 79. Ce passage est une paraphrase des premières lignes de la chanson (Je te trouverai charogne/ Un vilain soir !)

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 BOYAUTIN n.m.
 'Boyautin qu'empêche tout l'honneur de dormir', F1, 17.
*
 
BRAILLERIE n.f.
 Néologisme par suffixation à partir de braillement.
Ils me font repasser les horreurs ! les brailleries de Paouins avec des animaux, les pires !...' F1, 99.
*
 
BRANCHIS n.m. pl.
 'Toujours des bourreaux dans Paris ! toujours des tronchus, des branchis, des estrapadés ! des bouillus ! juste savoir de quelle secte vous êtes ? ' F1, 48.

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BRANQUIGNE n.f.
Note de la Pléiade (IV, 1296) : 'Branquigner, à partir duquel est formé branquigne, est issu de branquignoler, 'traîner de ci, de là en se livrant à de petits vols'. De son côté, le DFNC indique qu'un branque est une personne au comportement imprévisible, un peu fou, qu'il a d'abord désigné, un âne, puis un mauvais ouvrier. Pour la formation de ce nom, la note renvoie à A. Juilland, Les Verbes de Céline, IIème partie.
'Je me précipite à l'aide ! le mouvement de ma part !... J'en entraîne dix ! quinze à moi, là, des branquignes...' F1, 150.

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BRISQUE n.f.
 '- Vos blessure ? citations ? Brisques ?...' F1, 103.

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BROCHE n.m.
Note de la Pléiade (IV, 1299) : 'Diminutif de brochet qui veut dire 'maquereau' (note de Céline à l'usage de sa secrétaire en marge de la dactylographie). ' Le brochet appartient à la série des poissons qui suggèrent l'idée du poisson carnassier, avide, brutal (DFNC).
'Ils étaient complices... à l'instinct !... d'accord !... le broche naturel, pognon de tout : moi !... sautez muscade !...' F1, 165.

*

BROCHE n.f.
 La note de la Pléiade indique qu'il ne s'agit pas d'un mot d'argot. 'Etant donné le contexte, on peut supposer qu'il est employé ici métaphoriquement avec le sens de faire taire à partir du sens de fixer avec une broche, considéré comme vieux par le Trésor de la langue française.
 'L'accueil de la Cour ! Comment le Grand Procureur vous broche !' F1, 109. 

*

BRODILLER vb.
 Néologisme à partir de broder, au sens figuré et appliqué à l'art de la conversation.
 'Je m'amuse là je vous raconte, je brodille...' F1, 63.
*
 
BRRT onomatopée.
 Imite le ronronnement du chat Bébert. Voir 'Plof'.
 'Bébert en 'brrt' il causait, positivement. Il vous répondait aux questions' F1, 19.  

*

BUSINETTE n.f.
 Néologisme à partir de business, affaires ; désigne les professionnelles, c'est-à-dire les prostituées. Le terme est d'autant plus judicieusement trouvé que Céline fait référence aux rues de Londres.
 'Ah pas des petites crevettes businette!... Ah pas du tout ! des fleurs de poupées !' F1, 76.

*

 BUVARD (ALLER AU)
 'Je connaît personne comparable à Marc [Empième] dans les lettres de ce temps! Pas un qui y aille au buvard dans toute la plumasserie française ! Pas un seul rival!' F1, 20.

 


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C
 
CÉLINGRAD nom propre
Néologisme. Le suffixe fait non seulement référence à la Russie, mais aussi à ces villes dont le nom à récemment changé.
'Ma Statue ! mon Square ! mes Esplanades ! ma Ville ! Célinegrad !' F1, 119.
*
 
CIBOIRE nom propre
'Il pouvait parler d'égoïsme Jules ! saloperie !... comme le Clauriac ! comme Ciboire ! comme Larengon ! Monstres ! Monstres tous !' F1, 139.
*
 
CLAURIAC n.propre
Pour Claudel et Mauriac.
'Il pouvait parler d'égoïsme Jules ! saloperie !... comme le Clauriac ! comme Ciboire ! comme Larengon ! Monstres ! Monstres tous !' F1, 139.
*
 
CACATOÏSÉ p.passé
Néologisme à partir de caca et de la suffixation -isé.
Sloganisé, blablatisé, glotte au croupion, rabâcheur d'étronimes sottises, méchancetés lâches, délations folles, cacatoïsé plus et plus !' F1, 109.
*
 
CACHECTIQUE adj.
Terme médical. D'après le DHLF, emprunté en même temps que 'cachexie' (1538) au bas latin cacheticus (447), lui-même repris du grec kakhekticos', de mauvaise constitution.
'Sa préférée, la Sarcelle, cachétique, tousseuse, vraiment moche...' F1, 136.
*
 
CALTER vb. intr.
Argot. S'en aller, partir de, 'en hâte ou sous l'effet d'une contrainte impérative' (DFNC). En exclamation : 'filez'.
' '-Vous autres aussi, caltez ! zoust !' F1, 151.
*
 
CAMISOLÉ adj.
Néologisme à partir de camisole de force.
'Et la fille du '63' ! enchaînée, camisolée... mais le pire, le pire encore, la 'pip-celle' F1, 100.
*
 
CAMPÉADORS n.m.
?
'Tous les lâches sont romanesques et romantiques, ils s'inventent des vies à reculons, pleines d'éclat, Campéadors d'escaliers!' F1, 19.
*
 
CANER vb. int.
'Si je lui donnais un fort marteau là au môme, lui proposais de me fendre la tronche? (...) Il oserait pas!... Il canerait' F, 13.
*
 
CARABOSSÉ p.passé adj.
Néologisme à partir de Fée Carabosse, connue pour sa laideur, avec influence possible de cabossé.
'Je serais content d'y voir un peu plus clair, d'avoir un peu moins de vertiges... et même un peu moins de pellagre (...) Philippe Auguste l'a eu aussi... beau même en partant aux Croisades il est revenu franchement ignoble, ridé, carabossé, crouelleux' F1, 40.
*
 
CARFOURNIOT n.m.
?
' '- Toi par-là Arlette ! par-là !' Dans son cafourniot qu'il voulait...' F1, 153.
*
 
CARDIAZOL n.m.
?
'Il est à lire en camisole ! Fléau public ! dénonçons-le ! dénonçons-le ! choc ! cardiazol ! cabanon !' F1, 80.
*
 
CARRER vb. int.
Néologisme à partit de l'argot décarrer, lui-même issu, sans doute, de carre, ayant le sens de 'prison' (DFNC). Décarrer prend donc le sens de 'sortir de prison'. 'Sortir'.
' ' - Allez ! Allez ! Carrez ! Carrez !' ' F1, 151.
' ' - Allez maintenant, carre !' ' F1, 155.
' ' - Maintenant carre grand enflé ! la rue !' ' F1, 155.
*
 
CARRIOLER vb avec pronom conjoint en position de cod accompagné d'un autre cod.
Néologisme à partir de carriole. Transporter.
'Ils me carriolent tout mon matériel', F1, 14.
*
 
CASUEL n. m.
'Il se rattrapait sur les gouaches, le casuel !... les clients de la fenêtres...' F1, 127.
*
 
CEUSSES n.m.
Ceux, sous forme substantivée.
'Les artisans du bâtiment, les comités des Briques publiques, les ceusses qui construisirent les forts, les ceusses qui foutirent partout le feu ! ' F1, 60.
*
 
CHARABANC n.m.
?
'Sur mon tabouret là en fosse ou dans le charabanc cadenassé, hanté par les remords de rien...' F1, 83.
*
 
CHIALERIE n.f.
Néologisme à partir de chialerie, pleurer.
'Elsa ! le désespoir d'Elsa !... que sa culotte tient contre dix ! vingt ! trente ! la chialerie d'Elsa !' F1, 94.
*
 
CHICAND n.m.
Néologisme à partir de chicandier, menteur. Sans doute en relation avec chiquer, dans le premier sens donné par le Dictionnaire du français non conventionnel : feindre, simuler. Il est intéressant de constater que Céline donne parfois à ce mot le sens de consentir, et en sens négatif, refuse (ne rien savoir).
'Il peut braire, chicand !' F1, 87.
*
 
CHICHITER vb. int.
Néologisme pour faire des chichis, des manières.
'Oh, pas que je chichite, concède... biaise... ah pas du tout ! rien du tout !' F1, 109.
*
 
CHIERIE n. f.
Néologisme à partir de chier.
'C'est le pote en face, le '17' qu'est la chierie alors à tuer!...' F1, 43.
'Ah, vous avez marre à la fin ! chierie !' F1, 119.
*
 
CHIOTS, CHIOTTS n. m. pl.
Argot.
1.Lieu d'aisance.
‘Les chiots fuient, l’ascenseur monte plus, la concierge est vachement grand-mère…’ F1, 8.
2.Insulte.
'- Je te ferai la tête en céramique moi toi, dis, chiott !' F1, 153.
*
 
CHIQUER vb.
1. Hésiter, tergiverser, sans doute à partir de chicaner (Dictionnaire du français non conventionnel).
'La Cour Ultime non plus chique pas, elle fait rouer les héros de 14 sans sourciller !' F1, 160.
2. En construction négative et transitive, refuser. Voir chicand.
'C'est les épiciers de le rue de berce qu'ont les premiers fait scandale... Il coulaient plus rien chiquer pour nous avancer de la boustiffe... Il venaient rapporter leurs factures' MàC, 666.
*
 
CHNOC , CHNOK , SCHNOCK , n.m.
Familier. Imbécile.
'Ce baradaboum! la charge à la cellule du chnoc!' F1, 36.
'À moi qu'il demande ! l'enragé ! devant tous les chnocs !...' F1, 150.
' - Grouille ! Grouille ! Chnok ! Grouille !' F1, 157.
HIST.- Le mot désigne l'Allemand au début du siècle (DFNC).
*
 
CHTIR n.m.
Néologisme. La note de la Pléiade (1227) pour le citation tirée de F1. indique que ce mot ne figure pas dans les dictionnaires d'argot et cite une lettre de Céline à Albert Paraz (Cahiers Céline 6, 401) : 'Chtir veut dire 'je tire' vieux terme d'argot signifiant 'viande de cheval' -- au temps où la viande de cheval était viande pour très miteux acheteurs et où les louchebems filaient du chtir en lieu de bœuf à leurs clients.' Ici, Céline donne à ce terme le sens de 'cadavre'.
'Ils m'écrouent, je stagne, purule, pèle... Ils m'extirpent, renfournent!... au trou! Chtir!' F1, 25.
'Avec qui maintenant que ça nous charre?... avec du macchab...! Oui madame! Du chtir!' GB I, 144.
*
 
CLAMOREUSE adj.
'Pas d'abjuration là doucedé ! Non ! Non ! clamoreuse !' F1, 111.
*
 
CLANCUL n.m.
Néologisme. Albert Paraz étudie la formation de ce néologisme dans Le Gala des vaches, p. 138., à partir d'une lettre envoyée à l'auteur en 1947. A. Paraz propose le croisement de clanculaire, nom d'une secte qui exerce ses rites en cachette, et de clanculus, nom d'un mollusque qui prend la couleur de la roche pour échapper à ses prédateurs. Dans les deux cas, l'origine est à trouver dans le mot latin 'clam', en cachette. Voir note Pléiade (1224). Le DFNC  propose le croisement de clampin et cul. On retrouve ce mot chez Alphonse Boudard.
'Y a assez de clanculs par le monde qui triomphent', F1, 21.
*
 
CLAPER vb. tr.
Néologisme. Céline ne reprend que partiellement le sens de ce mot d'argot signifiant manger à partir de clapet, gosier. Pour fermer le claper, faire taire.
'L'accueil de la Cour ! Comment le Grand Procureur vous broche ! clape ! musèle!' F1, 109.
Hist. - Le DFNC indique que claper est influencé par un bruit de la langue. En wallon, claper signifie mordre.
*
 
CLING! CLING! onomatopée.
'Le cling! cling! Des enterrements... les cloches du cimetière... les clochettes...' F1, 43.
*
 
CLINQUER vb. int.
'Vous connaissez pas le lit 'Picot' ? le 'Picot', le lit colonial qui nous a valu des Empires !... Je clinquais du 'Picot'!... c'est tout en petites tringles et qui tintent !...' F1, 99.
'- Ah l'énergumène ! qu'ils se clinquent ! tintent !... les os qu'entrechoquent !' F1, 109.
*
 
CONFINERIE   n.f.
Néologisme à partir de confinement et du suffixe -erie.
'Je vous parlais de mes yeux... des ténèbres... des moisissures... la confinerie... la demi-famine... que fout la Croix-Rouge?...' F1, 73.
*
 
CONNADE n.f.
Néologisme à partir de déconnade.
'Les femmes lui parlaient de mes yeux... jaspins ! connades !... elles le connaissent !...' F1, 126.
*
 
CONNANT n., adj.
Néologisme à partir de déconnant, déconneur, idiot.
'Double jetard, bavard de fiel, donneur, connant...' F1, 111.
*
 
COQUETÈLE n.m.
Version francisée de cocktail.
'J'irais au coquetèle chez Lévy...' F1, 64.
*
 
CORBILLARDE , adj.
Néologisme. Synonyme de lente. Se réfère à l'allure de ce véhicule quand il conduit les morts au cimetière.
'Vous dites : vous aurez une auto ! Non ! L'auto est ventripoteuse, semi-corbillarde à flapis ! Je corbillerai pas !' F1, 71.
*
 
CORBILLER vb. int.
Néologisme à partir de corbillard, pour désigner la voiture, véhicule qui à Paris est considéré par Céline comme trop lent (voir l'adjectif corbillarde). Céline lui préfère, dans le passage cité ci-dessous, le vélo.
'Vous dites : vous aurez une auto ! Non ! L'auto est ventripoteuse, semi-corbillarde à flapis ! Je corbillerai pas !' F1, 71.
*
 
CORNEUX adj.
Néologisme pour doté d'une corne, et l'occurrence Roland de Roncevaux.
'Et quelles stridences ! ah autre chose que le Roland ronceveux !... corneux coin coin !' F1, 108.
*
 
CORNIFLOT
'Pellagre ! corniflots ! pellagre!' F1, 68.
*
 
COSMOMÉDIUMNIQUE adj.
Néologisme à partir de cosmos et de médiumnique, qui a trait au pouvoir que possèdent les médiums de servir d'interprètes aux esprits.
'La Colonne dévisse de la place, s'élève, s'enlève ! seule ! toute seule ! et brroung ! lui retombe toute sur la gueule !... vous réalisez ? c'est l'orage cosmomédiumnique !... le retour effroyable des choses !...' F1, 104.
'L'orage cosmomédiumnique gronde !...' F1, 104.
*
 
COUAQUOUAQUANT
Néologisme. Action de couaquouaquer, voir couaquer.
'En monôme ils partent, couaquouaquant, sifflant, crissant...' F1, 112.
*
 
COUAQUER vb.intr.
Néologisme à partir de couac, onomatopée imitant le bruit du corbeau.
‘De Brazaville, Berne ou Tobolsk, par toutes les fenêtres du quartier, ça se mugit, beugle, couaque…’ F I, 6.
*
 
CRACHIBLABLA n.m.
Néologisme, sans doute par croisement de cracher, archi et blablas.
' Si je reboume en dépit des haines, des crachiblablas des Artrons !...' F1,120.
*
 
CRÂNEUX s.m.
Néologisme. Désigne, dans Féerie 1, le prisonnier de la cellule qui tente de se fracasser la tête contre le mur.
'C'est le pire ! C'est le pire ! des heures qu'il m'a fait perdre, crâneux !...' F1, 101.
*
 
CRAPOTER vb.int.
'Faut que le rire vous gagne !... Vous rigolez pas ? Je crapote ! La fête est finie !' F1, 89.
*
 
CREVETTE n.f.
Ancien mot d'argot (1880) signifiant prostituée. Voir la note de la Pléiade (IV, 1271), qui cite Larchey, selon lequel la crevette est 'la fille hantant les crevés', le crevé étant un 'jeune élégant poussant à un degré tout féminin la recherche de sa toilette'. On peut avancer que le mot crevette est aussi un mot amical désignant un bébé (poupée) et par extension une femme.
'Ah pas des petites crevettes businette!... Ah pas du tout ! des fleurs de poupées !' F1, 76.
*
 
CROQUEVILLÉ adj. part.
Néologisme pour recroquevillé.
'Considérez aux eaux à Ax, à bagnoles, ces vieillards qu'on roule, mitouflés rogatons uriques, arthritiques à béquilles, podagres si tellement croquevillés, noués, souffreurs tous sens, ahanants acrobates d'enfer, face de gargouilles, hideux de supplices, calots hors...' F1, 71.
*
 
CROUELLEUX adj.
Néologisme. Voir la note très éclairante de la Pléiade IV (1242), selon laquelle le mot vient de l'adjectif écrouelleux, 'qui dans la médecine ancienne désignait un malade atteint des écrouelles, maladie caractérisée par un abcès du cou. Il faut rappeler que la guérison des écrouelles était un pouvoir traditionnellement attribué précisément aux rois de France'.
'Je serais content d'y voir un peu plus clair, d'avoir un peu moins de vertiges... et même un peu moins de pellagre (...) Philippe Auguste l'a eu aussi... beau même en partant aux Croisades il est revenu franchement ignoble, ridé, carabossé, crouelleux' F1, 40.
*
 
CROUPISSERIE n. fém.
Néologisme.
'Moi c'est la croupisserie d'années là dans ce trou qvec les otaries à droite, gauche, face, que je ne tolère pas !' F1, 47.
*
 
CROUSTILLAGE n.m.
'Eh vous là, qu'hurlez, fumant ! et ça que commence !... après le dépouillage, croustillage !... roustissement et darderie !...' F1, 110.
*
 
CRRAA(C) onom.
Bruit que fait la clé de la cellule de prison dans Féerie 1.
'Ils rebouclent ma lourde... craa ! craac ! craac! ' F1, 68.
*
 
CRUXI p.p.
Néologisme pour crucifié, c'est-à-dire assassiné (voir enchristé).
'Je suis parti par pure gentillesse, chevalerie atrurie voisine! vérité!, que personne soit cruxi pour moi!', F1, 45.
*
 
CY
A partir de -ci, en relation avec 'tel autre', dans une énumération.
'De quel côté vous étiez? Une fesse sur tel billot? Tel autre? La tête sus la potence de cy?', F1, 17.
*

 


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D
 
DACHE n.m.
Désigne le diable en argot.
'Je suis celui qu'a vendu le Plan 'Dache', la forteresse d'Ouque, le Pas-de-Calais, la tour Eiffel... et les arrières-pensées de Gamelin...' F1, 35 ;
'Ah si vous l'aurez! le Panthéon vous tout seul. On videra tout! Vous voulez pas? votre tête aux Bouffes! vos pieds à Dache! votre front à Sainte-Chapelle!' F1, 42.
*
 
DAMNÉMENT adv.
Néologisme à partir de l'adjectif damné.
'Gardez vos loustiqueries pour vous ! Vous aurez damnément l'usage !' F1, 91.
*
 
DANTUS pour Dante.
'Pas qu'aux gardiens pas qu'aux murailles que l'en veux ! aux Classiques, aux Penseurs d'abord ! magnifique poustouflant, l'ont eu : Pétrarque, Dantus! Homère ! Prout Prout !' F1, 81.
*
 
DARDERIE n.f.
Néologisme, croisement de dard et de ardre (brûler) avec suffixation en -erie.
Eh vous là, qu'hurlez, fumant ! et ça que commence !... après le dépouillage, croustillage !... roustissement et darderie !...' F1, 110.
*
 
DAUFLEUR interj.
 'Allez vous faire luire! Caraïbe! daufleur!... mal élevé! Jazzband!' F1, 39.

*

DÉAMBULEMENT n.m.
 'C'est le déambulement des tordus !... le long, tout le long!' F1, 49. 

*

DÉBLATÉRATION n.f.
Néologisme à partir de déblatérer.
'Ça a dû être abominable la déblatération de ce pitre ! bosco cul-de-jatte jaloux venin' FII, 183.
*
 
DÉBOULADE n.f.
Néologisme à partir de débouler, terme argotique puis familier signifiant d'abord 's'enfuir, déguerpir', puis 'arriver brusquement', 'fondre sur' (DFNC).
'Le calme par la force! ils passent d'un palier à l'autre... où c'est drôle c'est les suicides... la trombe! tous les gaffe! Cette déboulade! F1, 35 ;
 'Les autres (...) veulent le métro ! Déboulades ! Carambolade !' F1, 149.
*
 
DÉCARRER vb. intr.
Argot. 'Partir'. Voir carrer.
' '- Décarre ! ' ' F1, 151.
'Missionné assassin le môme-ci? Oh pâlot! Pâlot... Enfin zut, ils décarraient pas!' F1, 23.
*
 
DÉCOULER vb. int.
 Pour 'il sourd du mur un liquide'
 'Ces murs découlent, j'éponge les flaques...' F1, 27.
*
 
 
DÉGEULASSEMENT, adv.
 'J'irai pas, reproche vivant, renifler, me rendre compte combien on m'a sali, volé, dégueulassement trahi, médit !...' F1, 53. 

*

DÉGOUFFREMENT n.m.
Néologisme. Mouvement de reflux.
'Là votre propagande, ultima ! le grand fourmillement, la fièvre noire, les engouffrements au métro! dégouffrements ! Ciné ! meetinges ! théâtre à poil, demi-poil !...' F1, 113
*
 
DÉPOUILLAGE n.m.
Néologisme pour dépouillement, à propos des richesses de quelqu'un.
'Eh vous là, qu'hurlez, fumant ! et ça que commence !... après le dépouillage, croustillage !... roustissement et darderie !...' F1, 110.
*
 
DERGE n.m
'-Il biaise ! il faux file ! Derge ! Fantoche !' F1, 78.
*
 
DÉVALISAGE n.m.
Néologisme à partir de dévaliser.
'Tenez, puisque je vous cache rien, chez moi rue Gaveneau 'septième', quinze équipes se sont succédé au dévalisage en mettons... seize mois!... vous pensez!' F1, 25.
*
 
DÉVOYEUR n. m.
Néologisme, qui dévoie.
'S'il était béni le fias ! le Jules ! le dévoyeur ! le naufrageur !' F1, 138.
'Et sept étages sans ascenceur ! s'il était béni le fias ! le Jules ! le dévoyeur !' F1, 138.
*
 
 
DINGUEUSE n.f.
 'Donc des dingues, dingueuses ! ce qu'il me faut !' F1, 80.

*

DOUCEDÉ p.p.adj.
 'Pas d'abjuration là doucedé ! Non ! Non ! clamoreuse !' F1, 111.
*
 
DOUTANCER vb.
 Néologisme à partir de l'argor doutance, doute.
 'Ah l'amnistie que vous allez voir! Ouais?.. Ouai? Ouai?...vous doutancez?' F1, 42. 

*

DOUTERIE n.f
 Néologisme à partir de doute.
 'Jamais la plus petite douterie !... L'exquisité de mon écoute !... Chef d'orchestre en somme !...' F1, 97.
*
 
DROPER vb.int.
'Ça drope je vous jure !... la route de Gonesse à Paris !...' F1, 93.
*
 
DROSSER vb intr
 'Vous redéboulez votre toboggan, voguez, ramponnez, drossez! encore plus bas!', F1, 15.
*

 


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E
 
EBAUDISSEMENT n. m.
Néologisme à partir de s'ébaudir, se réjouir.
'Eh vous là, qu'hurlez, fumant ! et ça que commence !... après le dépouillage, croustillage !... roustissement et darderie !...' F1, 110.

*

ÉCARTLER vb. tr.
Néologisme à partir de écarteler.
'-Qu'on le transperce illique ! écartle!' F1, 74.
*
 
ÉCHARDERIE n.f.
Néologisme à partir de écharde, sous le modèle tuerie.
'Et l'estrapade qui recommence !... votre écharderie générale !... tous les membres du tribunal se repassent le martinet de flamme et cous secouent l'ardeur qui mieux mieux !...' F1, 111.
*
ÉCRIRE dans sa forme au conditionnel.
'Gredin !' vous vous écrieriez !... il nous enfle ! le fripon nous erre !...' F1, 52.
*
 
 
ÉCRIVAINISSIME n.m.
Italianisme; Céline imagine un retour au Bourget (qui a bien eu lieu) marquant la fin de son exil danois.  
'Vous pouvez pas vous rendre compte du bien qu'on dit partout de vous! L'Écrivainissime du Siècle!' F1, 41.

*

ECTO première partie de l'interjection ectoplasme.
'Voilà l'effet des vitamines! Je l'interloque... tout ecto qu'il est! plasme!' F1, 39.
*
 
EGORGERIE n.f.
Néologisme à partir de égorger, indique les hurlements consécutifs à un égorgement.
'Plus le chœur des gourmets de la nuit qu'était couvert encore lui-même par la bacchanale animale, éventreries, égorgeries, amoureries de vingt-cinq zoos !' F1, 98.
*
 
ÉMANER vb. en emploi personnel.
'Vous dire le moral que j'émane!...' F1, 38 (Comprendre : C'est vous dire le moral qui émane de ma personne).

*

ÉMERGER vb. en emploi transit. avec cod de personne.
'Il m'émerge au vasistas (...) et il m'émerge juste au petit jour...' F1, 27 ;
'Il m'émerge au vasistas!' F1, p.36 ;
'L'Hortensia m'émerge...' F1, 39.
*
 
EMMOITÉ p.passé adj.
Néologisme à partir de moite.
'Regardez clients et clientes emmoités, émerger chancelants blets des Antres, plus reconnaissant nord de sud !' F1, 80.
*
 
ÉMOUSTILLEUSE adj. f.
Néologisme, qui émoustille.
'Et émoustilleuses et causeuses et cavaleuses de musettes !... grands magasins ! caves saphistiques !...' F1, 80.
*
 
 
ÉMOUVOIR vb. existant, avec conjugaison différente à la troisième personne du pluriel.
'Au moins cinq millions de personnes qui s'émouvaient' F1, 29.  

*

ENCHRISTER vb.tr.
 Néologisme pour mis sur la croix comme le Christ.
 'Oui! Il ment pas!' enfin il ment pas! Il dit vrai! Saloperie alors! Verno! Ils l'enchristent! martyr!', F1, 43.
 'A pillé, outragé, traqué, enchristé, sali, un héros ! lui infligé mille satanies, mille mille hontes ! misères !' F1, 109.

*

ENCOLÈRER vb.int.

Néologisme pour 'se mettre en colère'.

'Je m'encolère là sur mes croûtes de repenser !'F1, 146
 *
 
ENCONTRE préposition
'Face à lui'. A propos de Marcel Aymé, dit Marc Empième :
'Il distille le songe comme une fée... y a Maupassant et puis lui-même. Autour? avant? encontre? parmi? Des lazzarones!...' F1, 20.
*
 
 
ENCOLÉRÉ p.passé.
Néologisme à partir de colère. Voir enfurier.
'Vous êtes aussi drôlement du Diable ! tout têtu comme !... mais pas à me défoncer mon mur !... pas encoléré à mourir !...' F1, 104.
*
 
ENCOTONNÉ p.présent.
Néologisme, la tête couverte de bandes de coton médical.
'Il se sera écrasé un peu le front... voilà ce qu'il se sera fait, fendu le cuir, pas l'os !... alors ?... alors ?... enturbanné, encotonné ...' F1, 101.
*
 
ENCULOMAN n.m.
Néologisme à partir de enculé.
' - Qu'a pas Féerie, plouc et miteux ! Crotteux, rateux, ignare, barbare ! enculoman sans horizon !' F1, 112.
*
 
ENFURIER vb.tr.
Néologisme, mettre en fureur. Voir encolérer. 
'Je les enfurie triple !...' F1, 103.
*
 
ENGLOUTER vb. tr.
Néologisme à partir de l'onomatopée glouglou, avaler.
'Vite l'abjuration de vos vilenies devant que l'enfer vous engloute !' F1, 111.
*
 
ENGOUFFRÉE n.f.
Néologisme pour engouffrement.
'Le vaste mouvement des extrêmes !... l'enveloppement... quarante escadrons comme un seul !... cette poulopade !... l'engouffrée !...' F1, 107.
*
ENJÔLERIE n.f.
Néologisme.
'Je venais pour le féliciter il m'attaque que je lui lève ses filles ! quel accueil ! cette mauvaise foi !... lui qui s'occupait d'enjôlerie !...' F1, 125.
*
 
ENMOUR n. f.
Néologisme à partir de mon amour, voire mamours et de la forme verbale s'enamourer.
'Ah, prends m'en tout! m'enmour! enmour!(...) Ah! mamour! D'amour! enmour! Ton cœur!' F1, 29. 
*
ENQUILLER vb tr.
Argot. Entrer dans, pénétrer dans, mais aussi posséder sexuellement, d'où peut-être, par glissement, s'emparer. On peut aussi penser au kil de rouge, la bouteille d'un litre, ici utilisée non pas pour le vin ordinaire mais pour le champagne.
'Mais qui qui l'enquillait le champagne ?...' F1, 129.
'Et enquilleur de rouge comme pas !...' F1, 132.
HIST.- D'après le DFNC, Théophile Gautier serait à l'origine du mot argotique, par renforcement de l'ancien quiller (XVIe siècle), signifiant 'pénétrer'.
 *
 
ENTRANGLER vb.tr.
Néologisme pour étrangler.
'Qui l'entranglera le beugleur monstre ? hululeur ! cagoulé féroce fendeur d'âmes, l'hiver baltave !' F1, 49.
*
 
EQUISITÉ , n.f.
Néologisme à partir de exquis
'Jamais la plus petite douterie !... L'exquisité de mon écoute !... Chef d'orchestre en somme !...' F1, 97.
*
 
EROTER (S') vb pr.
'Pensez à ce que se lit par le monde ! de quoi ça pleure, s'esclaffe, s'érote, en chemin de fer ou dans les Jurys !' F1, 122.
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ERRER , vb. dans la construction errer quelqu'un.
Pour induire en erreur, perdre à partir de errer et de erreur.
' 'Gredin!' vous vous écrieriez !... il nous enfle ! le fripon nous erre!...' F1, 52.

*

ESCOGRU n.m.
Néologisme à partir de escogriffe.
'Il nous insulte l'escogru ! qu'on le découpe ! tranche !' F1, 67. 

*

ESCOPETTE ou ECOPETTE n.f.
 'Votre nez engagé compressé dans l'entre-fesse ! votre escopette ! tâché ô Dieu ! (...) votre écopette à l'envers.' F1, 114.

*

ESTOUFARÈS , vb. tr.
D'après l'édition de la Pléiade (Tome IV), vient de estouffade et estoufa, signifiant étouffer en provençal ; le participe à la même forme que l'infinitif de boucler, bouclarès, signifiant enfermé. Il a dans la première citation le sens de volé.
'Je vous ai dit page Y! H! Z! 7ème gauche!... ils ont tout embarqué, va voir! Estoufarès! de façon! Pillé là-dedans! ce saccage!' F1, 43 ;
'Plus étranglé, plus estoufarès par ma conscience que les hurleurs sous la table' F2, 278.
*
 
ESTOURBISSERIE n.m.
 Néologisme à partir du verbe estourbir signifiant assommer ou tuer; et du suffixe -erie déjà utilisé pour hurlerie, pataugerie, peausserie, etc., tous dénotant l'idée de meurtre collectif, sans toute sous l'influence de tuerie.
 ‘Ils sont donc là pour l’imminence… l’estourbisserie du vieil ami… Clémence et son fils…’, F1, 7.

*

ESTRAPADE n.f. 
'Et l'estrapade qui recommence !...' F1, 111.
*
 
 
ESTRAPADÉS n.m. pl.
 'Toujours des bourreaux dans Paris ! toujours des tronchus, des branchis, des estrapadés ! des bouillus ! juste savoir de quelle secte vous êtes ? ' F1, 48.
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ETRONIMIE n.f.
 Néologisme à partir de étron.
 '' Sloganisé, blablatisé, glotte au croupion, rabâcheur d'étronimes sottises, méchancetés lâches, délations folles, cacatoïsé plus et plus !' F1, 109.
*
 
 
ÉVENTRERIE n.f.
Néologisme à partir de éventrer, s'applique surtout au bruit consécutif au sévice.
'Plus le chœur des gourmets de la nuit qu'était couvert encore lui-même par la bacchanale animale, éventreries, égorgeries, amoureries de vingt-cinq zoos !' F1, 98.
'De ces saturnales de mariages, des éventreries de tréfonds d'ombre !...' F1, 99.
*
 
EXCRUCIANTES adj.
Archaïsme. Céline lui-même donne le sens de ce mot, qu'on retrouve dans la langue anglaise.
'Douleurs excruciantes... le terme est plus dans le dictionnaire 'excruciantes'... pourtant c'était un terme riche, il évoquait cru, arrachait... vous l'oubliiez pas dans l'oreille... les conjurés l'ont supprimé... il fallait ! il fallait !... leur tâche !... pâlir, appauvrir notre langue !...' F1, 119.

*

EXTRAORDINAIRE n.m.
Comme substantif pour 'son côté extraordinaire', sa particularité.
'Bébert son extraordinaire c'était la promenade, la balade, sa façon de nous suivre.' F1, 19.
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G
 
GADOUILLEUX adj.
Néologisme à partir de gadoue, boue. Boueux.
'Oh là ! baudruche, gadouilleux cave ! crève raisonneux !' F1, 76.
*
 
GAF(F)E n.m.,
Argot. Gardien de prison.
'Le calme par la force! ils passent d'un palier à l'autre... où c'est drôle c'est les suicides... la trombe! tous les gaffes! Cette déboulade!' F1, 35 ;
'Les gaffes, les cinq étages d'échelons d'acier qu'échangent leurs trousseaux', F1, 74.
*
 
GAJURE n. f.
Gageure.
'Ah, dites, gajure qu'on vous enferme' F1, 29. La gageure, comme l'indique la note de la Pléiade (IV, 1231) serait d'arriver à faire rire le lecteur de Féerie au point qu'on l'enferme comme fou.
*
 
GALOPERIES n.f.pl.
Néologisme pour galopades, ici la course des chasseurs à la poursuite de Céline transformée en proie.
'Je me marre ! j'aboye !... si je leur fourvoye leurs galoperies... le ranz !' F1, 67.
*
 
GARCERIE n.f.
Néologisme à partir de garce.
' - Ah garcerie ! Ah dos de fer ! En arrière ! En arrière au trou !' F1, 114.
*
 
GÂTELOTTER (SE) vb. pron.
Néologisme formé à partir de gâter, avec influence possible de gâteau, suffixation impliquant l'idée de combler quelqu'un d'attentions, de cadeaux. À propos de Marcel Aymé, dit Marc Empième :
'C'est donc très juste qu'il se dorlotte, bobiche, gâtelotte, se refuse rien' F1, 20.
*
 
GÊNEMENT n.m.
Néologisme à partir de gène.
'Des millions de gens que la tête les gêne... c'est la calamité du Monde le gênement de tête !...' F1, 101.
*
 
GI interjection pour oui.
‘Je sais ce que je dis ce môme sera tueur qu’à quatre ou cinq. Gi ! Pourquoi sont-ils venus alors de si loin ?’ F I, 7.
*
 
GLACIS n.m.
La note de la Pléiade (IV, 1230) indique que les glacis, à Paris, désignaient les parties externes, en pente douce, des anciennes fortifications élevées autour de Paris. Céline utilise le terme pour parler des points où la butte Montmartre rejoint le niveau du reste de la ville.
'Oh que j'ai déçu! Pas seulement autour, là, la Butte, les glacis, Caulaincourt...' F1, 28.
*
 
GLOUGLOU n.m. onomatopéique.
Alcool, boisson.
'Je peins que pour le glouglou, moi, pour boire !...' F1, 131.
*
 
GLOUGLOULOUTER vb.int.
Néologisme à partir de glouglou, qui implique l'idée d'ingestion.
'Ah l'adorons ! ah, le tuons ! glouglouloutons ! suçons ! l'achetons !...' F1, 80.
*
 
GLUANCE n.f. 
Néologisme à partir de gluant.
‘La manière que ça va saigner, couler à torrents, viscères partout ! la gluance, le charnier nazi !’, FI, 10.
*
 
GNASSE ou GNIAS ou GNIASSE
1 Type.
'Le voilà foudroyeur en Cour qui vous expédie le piètre gnasse as patres ! au bagne ! tcetera !' F1, 66 ;
'Le gniasse touché se sauvait ! braillant ! saignant...' F1, 133 ;
'Il est bon gnias dans un sens' Pléiade IV, App. II, 626.
'Il avait la force aussi !... et la ruse !... le gniasse touché le sauvait ! braillant ! saignant...' F1, 133.
2.Une tendance à la confusion est certaine chez Céline avec gniard, enfant.
'Le duo d'accouchement maman le petit gniasse, voilà un accord à se souvenir...' F1, 97.
*
 
GNIAF n.m.
'Elle hésitait... et je voyais que ce sale gniaf cochon il demandait que ça s'envenime !...' F1, 152.
*
 
GNIAS voir GNASSE
*
 
GNIASSE voir GNASSE
*
 
GODANT , participe présent.
Argot. jouissant, c'est-à-dire, par antiphrase, souffrant.
'Voyez un peu le cran, le tonus! Cinq, six jours je garde cette forme! godant! crépitant! Les feuillets que je couvre!...' F1, 39.
*
 
GODER vb.tr.
Jouir, sans doute à partir de godemiché, ou plus probablement (Céline est un spécialiste là-dessus) à partir de goder, 'gonfler', 'bouffer', 'faire un faux pli'. Cependant, les interprétations sont nombreuses. Voir à ce sujet la longue note du DFNC.  Notons qu'il pourrait venir d'un abrègement de gosiller (même sens), d'une emprunt au latin gaudire, se réjouir, ou à l'ancien français goder, 'faire l'amour'. Comme l'indique le glossaire de la Pléiade, signifie 'entrer en érection, être sexuellement excité'. 
'Vous auriez autrement, godé, là, net fol ! et gratis si ils m'avaient traîné place Blanche', F1, 28 ;
'Oh mais vous godez Sibérie ! C'est pas qu'Hortensia votre marotte ! Sibérie ci ! Sibérie là !' F1, 50 ;
'Elles viennent se marrer eh ! goder ! connes !' F1, 136 ;
'Auparavant vous avez godé comme des papes !' Pléiade IV, App. IV, 895.
*
 
GONO interj.
'T'est foutu le camp! voyou! couard! gono!' F1, 28
*
 
GOUALANTE n.f.
'C'est une chanson de classe je peux dire... tout de tact!... de finesse!... pas la goualante à tout le monde!' F1, 37.
*
 
GOURDIFLER vb. int.
'- Faut que je la modèle, gourdifle ! Saisis ? La pâte d'abord ! puis la glaise !' F1, 153.
*
 
GOURGANDIN
Néologisme à partir de gourgandine (repris dans la citation qui suit par la dernière syllabe) femme de mauvaise vie.
'Hésitez plus ! citoyens ! yiènes ! gourgandins ! dines !'
*
 
GOYOT ou GOYAU n.m.
Argot. Prostituée de bas étage.
'Et pas des goyots, des beautés fraiches ! et de bonnes familles !...' F1, 135.
*
 
GREDINETTE n.f.
Néologisme à partir de gredine.
‘Les femmes ça décline à la cire, ça se gâte, fond, coule, boudine, suinte sous soi ! mutines à poison, gredinettes, pertes, fibromes, bourrelets, prières…’, F 1, 8.
*
 
GRILLERIE n.f.
Néologisme à partir de griller.
'À l'abattoir, aux phosphores, aux grilleries-lamineries-les-tripes, les Droits de l'Homme et la fraternité !' F1, 64.
*
 
GROGNONER vb. intr.
Néologisme à partir de l'adjectif grognon, de mauvaise humeur.
'Cette clique de cons s'éloigne... grognonne.' F1, 119.
*
 
GUIGNER vb. int.
Argot. Malchance qui atteint la personne victime du 'mauvais œil', qui est regardé avec une intention malveillante (DFNC). Ici, il faut sans doute comprendre 'regarder avec envie et curiosité'. Du gallo-roman *gwinyare, faire signe. Regarder qqch avec envie, le convoiter (Gd usuel Larousse).
'Tous les corniauds du point de vue guignaient, risquaient, bavaient chez lui...' F1, 139.
‘Clémence c’est mon local qu’elle guigne, la vue sur Paris, l’ascenseur, le métro tout près…’ FI, 9.
*
 
GUITOUNE n.f.
Argot. Tente, cabane, petit baraquement. Ici, il s'agit de l'atelier de Jules.
'Toute sa guitoune !... tout branlait, moisi... tout le coin devait être rurbanisé tout l'îlot et le Maquis derrière...' F1, 130.
HIST. - Le DFNC indique que l'origine du mot vient de l'arabe maghrébin, gitun. 'Chez les soldats du Second Empire, la guitoune est une tente de campement, puis, pendant la Grande Guerre, un abri de tranchées.
*
 
GYMNASTISTE n.m.
Néologisme. Qui prône la gymnastique comme hygiène de vie. Mot formé sur le modèle de génétiste.
'A quoi que votre trou du cul ressemble ?... Re-quatre pattes ! hardi !... génétistes ! anatomistes ! gymnastiste ! pathologiste comparatiste !' F1, 116.
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H
 
HACHURÉ p.p. adj.
Pour haché.
'Les tanks vous ayant laminé, hachuré, les napalms bouilluz, je vous retrouverai !' F1, 79.
*
 
HANTEUR n.m.
Néologisme à partir de hanter.
'Même que vous seriez plus hanteurs tracassiers, assoiffés, mille fois, que tout l'espèce d'Afrique, d'Asie, chacals, Amérique réunis, condors et dragons, il s'en gode!' F1, 22.
*
 
HIHAHANER vb.int.
Néologisme formé à partir des onomatopées du rire hi!hi! et ha!ha!.
'Que vous convulsiez par exemple, hihahaniez de mes saillies, plein les Tuileries!...'F1, 29.
*
 
HOLLYWOYE adj.
Néologisme pour hollywoodienne, la langue hollywoye étant l'anglais parlé aux Etats-Unis.
'Y a que les tritres qui parlent anglais et allemand, chinois, volapük et le 'pelliculi' forcément !... La langue hollywoye !...' F1, 85.
*
HORIONER vb.int.
Néologisme à partir de horion. Donner des coups violents. Le DHLF fait l'hypothèse d'une 'altération de l'ancien français orillon, oreillon (dérivé de oreille), 'coup sur l'oreille, avec adjonction d'un h à valeur expressive. P. Guiraud, relevant qu'en ancien français horion désigne un coup (de lance, d'épée) et une maladie qui frappe, rattache le mot au latin classique haurire, 'épuiser'. Rare aujourd'hui.
'Les pressés du métro !... si ça s'horionne !' F1, 147.
*
 
HOQUER vb. int.
Pour hoqueter.
'L'acuité des hurlements de femmes! Les hommes hoquent...' F1, 35.
*
 
HOUDAN
Céline a noté en marge du tapuscrit : 'poulet spécial de Houdan' (Pléiade IV, 1285, note 1).
'Qui lit Féerie n'a plus faim ! Jamais ! passez-vous d'ortolans !... d'houdans, paupiettes, cervelettes, mais Féerie !' F1, 112.
*
 
HULULEUR n.m.
Néologisme à partir de hululer, bruits que produisent les rapaces nocturnes.
'Qui l'entranglera le beugleur monstre ? hululeur ! cagoulé féroce fendeur d'âmes, l'hiver baltave !' F1, 49.
*
 
HURLERIE n.f.
Néologisme à partir de hurlement et, sans doute, hystérie.
‘Les radios laissent aucun doute. Et les bavards donc ! les cafés, les foules, les trottoirs ! C’est la hurlerie générale… les Boches sont foutus !’, F1, 9 ;
'Oh, mais je les entends à l'action!... ici... là... un étage... un autre... le gong des baffes, la hurlerie! et puis plus rien... le calme par la force!' F1, 35 ;
'Sa hurlerie m'impressionne pas ! Médecin je suis !' F1, 88.
'Ah comme hurlerie autre chose que sept ! dix étages de prison !...' F1, 97.
*
 
HYÉNEUSE n. et adj.
Néologisme à partir de hyène. Qui hurle.
' (...) pisse, sue du sang, plus braillards! Dérate à la charge de pas moi! À la Lune! Hyéneuse!' F1, 22.
*
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I
 
ICONOCLANT n.m.
Néologisme pour iconoclaste. Désigne ici ceux qui n'adhèrent pas au mouvement de réconciliation nationale à la Libération.
'Malheur aux Salisseurs d'héros ! plaies de feu aux Iconoclants !' F1, 103.
*
 
INVALIGNES
Néologisme pour Invalides.
'Et l'assassinat du Robert et de Mme Thérèse Amirale, tôlière, fée maligne aux Invalignes...' F1, 83.
*
 
ILLIQUE adv.
Néologisme, déformation de 'illico', sur-le-champ, immédiatement.
'-Oh vous seriez massacré illique !' F1, 67 ;
'- Qu'on le transperce illique ! écartle!' F1, 74.
*
 
INVIDIVIA n.f.
Néologisme, croisement de latin et de javanais. Envie.
'Oh je m'amuse! vanitatas! Invidivia! Javalousie! Comme Jules?' F1, 21.
*
 
IMMINER vb impersonnel et transitif.
Néologisme à partir de l'adjectif imminent, qui est sur le point de se produire.
‘Pour ça qu’ils sont venus tous les deux… Clémence et son fils… Ça immine…’, F I, 6.
*
 
IMMUN adj.
Néologisme pour immunisé.
'Oh des invectives ! je suis immun !... pensez les épreuves !...' F1, 78.
*
 
INÉCOEURABLE adj.
Néologisme pour 'qu'on ne peut pas écoeurer'.
'C'est la méchanceté qui m'achète ! la plus attachée têtue inécoeurable cliente du monde !...' F1, 80.
*
 
IRRUPTER , vb. int.
Néologisme pour faire irruption.
'La garde irrupte, quatre mitraillette, je leur fais signe : je colle!' F1, 38.
*
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J

 
JAILLER vb. intr.
? Néologisme. À propos de Marc Empème (Marcel Aymé) :
'Il jaille, lui, triomphe en tout' F1, 21.
*
 
JALMINCE adj.
Argot. Jaloux.
'Il passerait des heures dans sa caisse, tout contre le banc, juste au trottoir, que je me rapproche, qu'il me scie ma fourche et puis m'assomme ! jalmince à crever qu'il est !...' F1, 125.
*
 
JAQUOT n.m.
'A traverser l'avenue Gaveneau ! Catastrophe !... si pas danseuse !... (...) les créatures, les autres, misère ! patouillent ! pflam ! pflam ! raides des jaquots, bâtonnent, panardent !' F1, 137.
*
JARDINER vb.int.
Ancien français. La note de la Pléiade (IV, 1292) indique : 'En employant jardiner au sens de 'faire l'amour', 'avoir une aventure galante', Céline retrouve un des signifiés du verbe en ancien français (voir Trésor de la langue française) au dépens du sens argotique qui figure dans les dictionnaires de la fin du XIXe, de L. Larchey, de Ch. Virmaitre notamment (mais guère dans les dictionnaires récents) : 'railler', médire de' '.
'J'aurais jardiné chez Jules, il se serait régalé aussi...' F1, 136.
'Le pire c'est qu'il me prenait à part et qu'il m'accusait moi d'être fesse ! trousse-fesses ! trousse-tutus ! de jardiner !' F1, 145.
*
JASPIN n.m.
Néologisme à partir de l'argot jaspiner (propos fielleux), à la place de jaspineur (rare). Croisement probable, au XVII eme siècle, entre jaser, l'ancien verbe jasper, 'aboyer', et les fréquentatifs issus de japper, comme jaspiller.
'Les femmes lui parlaient de mes yeux... jaspins ! connades !... elles le connaissent !...' F1, 126.
*
 
JAVALOUSIE n.f.
Javanais pour jalousie.
'Oh je m'amuse! Vanitatas Indivivia! Javalousie! Comme Jules?' F1, 21 ;
'Julot mon pote [...], la javalousie faite homme!...' Pléiade IV, App IV, 877.
*
 
JEUTARD n.m.
Néologisme à partir de joueur.
'Double jetard, bavard de fiel, donneur, connant...' F1, 111.
*
 
JOUISSERIE n. f.
Néologisme à partir de jouissance.
'Ah! Jouisserie néon! La folichonnerie totale!' F1, 28.
*
 
JOUXTE , forme verbale adjectivée ou nominalisée.
Désigne dans Féerie 1 le voisin, qui jouxte la cellule.
'Et le '64'! mon jouxte phoque! qui me traverse le mur! positif!' F1, 36.
*
 
JUTERIE n.f.
'Vous crierez quand vous accoucherez ! et vous vaudrez jamais quand même tous vos pâmeries juteries le héros qu'on écrabouille qu'on gait pourrir exprès en croix qu'a voulu que vive sa Patrie !' F1, 161.
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                                                                                                                *

 

 

K

 

KAOLIN n.m.
Technique. Désigne une terre à porcelaine. Mot issu du chinois kao ling, composé de kao, 'haut' et ling 'blanche', argile blanche.
'-Celle-là je la vois en kaolin ! en Dresde t'endends ! Je la moule, je la débute, c'est tout !' F1, 136.
*
 
KNOUT n.m.
Reprise du premier terme de knout out, k.o., signifiant frappé, assommé, sous le pouvoir d'une puissance violente.
'L'heure d'aujourd'hu la bastille ils la laisseraient debout, ils y enfermeraient tous les impurs, enchaînés comme! tous les écrivains tête de lard, au boulot! sous knout! Vingt chefs-d'œuvre par jour!' F1, 35 ;
'Dostoïevsky en raffolait qu'il écrivait des lettres au tsar Petit pépère ! Petit Papa ! qu'il lui vouait un reconnaissance qu'il en revenait pas que c'était bon ! la révélation ! l'âme ! le knout ! ' F1, 51.
*
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L

 

LALAÏYOUTANT p.présent.
Néologisme onomatopéique imitant les chants suisses.
'Ils chantent les Banques Suisses ! Ils dansent lalaïyoutant !' F1, 89.
*
 
LANLAIRE
?
'Lanlaire !' F1, 110.
*
 
LARENGON
?
'Il pouvait parler d'égoïsme Jules ! saloperie !... comme le Clauriac ! comme Ciboire ! comme Larengon ! Monstres ! Monstres tous !' F1, 139.
*
 
LAZZARONE n.m.
Mot rare d'origine italienne dont le pluriel, dans la langue originale, est 'lazzaroni'. À Naples, homme du bas peuple, mendiant. A propos de Marcel Aymé, dit Marc Empième :
'Il distille le songe comme une fée... y a Maupassant et puis lui-même. Autour? avant? encontre? parmi? Des lazzarones!...' F1, 20.
*
LOPE n.f.
Argot. Inverti, homosexuel, par abrègement de lopaille. Par extension : individu sans courage ni dignité (DFNC).
'Toujours plein de curieux à ses fenêtres... bobines, massacres, pipes, demi-lopes, touristes, bignolles...' F1, 133.
*
 
LOUCHERIE n.f.
Néologisme. Ce qui est louche, suspect.
'Les nouvelles des hommes puent toujours la feintise, la loucherie, le crime...' F1, 160.
*
 
LOUSTIQUERIE n.f.
Neologisme à partir de loustic, farceur.
'Gardez vos loustiqueries pour vous ! Vous aurez damnément l'usage !' F1, 91.
*
 
LURELURE ou TURELURE n.f.
Néologisme à partir de tirelire, tête. D'après Littré, cité dans la note de la Pléiade (Pléiade IV, 1227), le mot turlure n'est employé, dans la langue familière que dans l'expression : 'c'est toujours la même turlure', c'est-à-dire 'c'est toujours la même chose'. Voir tétère.
'Elle nous ramène les gens les mêmes, les 'doubles' s'ils sont plus, les même gestes, les mêmes turlures'...' F1, 25.
'Il pourra se fendre la lurelure, Putois ! dans le trantran des horreurs, salut !...' F1, 96.
'Tête première !... sa t6ete le gêne ! Belle turelure !...' F1, 101.
*

 

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M

 

MANDRIN n.m.
Mandrin désigne un ‘appareil qui se fixe sur le nez d’une machine-outil ou de certains outils portatifs (par ex. perceuse, ponceuse) et qui sert à assurer le serrage de l’élément tournant’, en relation avec le ‘garrot’ (encolure, mais aussi supplice par strangulation) et la place de la Concorde (lieu d’exécution des condamnés à la guillotine). Autre lien possible: Louis Mandrin, bandit (1724-1755), chef de bande de contrebandier, condamné à mort et exécuté à Valence en 1755 (Gd Usuel Larousse).
‘Le dernier Fritz à la Villette tous les coutelas sortent ! Juré ! Garrots, mandrins, principes, Honneur, Patrie !’ F I, 9. Attaque contre les résistants de la onzième heure.
*
 
MAGOG nom propre substantivé car catégorisation.
Voir la très complète note de l'édition de la Pléiade IV (1221). La référence 'évoque l'histoire du prince Gog, du pays de Magog, présenté comme menaçant le judaïsme à la tête d'une coalition de peuples du Nord, mais que les exégèses chrétiens ont interprété comme une figure des envahisseurs d'origine asiatique'. Voir également Cahier Céline 6,190.
'Si vous fûtes étiqueté, pinglé, étnedu, horreur d'univers, vache maudite, ogre, magog, perfide frappe' F1, 17.
*
 
MALGAMÉ p.p.
Néologisme apocophe à partir de amalgamé.
'Et le Casino alors dites ?... le monument d'étonnement même !... armorique-métro malgamé granits, cabochons, petites chimères, menhirs, briques, ardoises !...' F1, 55.
*
 
MAMOUR n.m.
Mot formé à partir de la forme plurielle mamours (mon amour) désignant les grandes démonstrations de tendresse.
'Ah, prends m'en tout! m'enmour! enmour!(...) Ah! mamour! D'amour! enmour! Ton cœur!' F1, 29.
*
 
MARIOLANT p.prés.
Néologisme à partir de faire le mariole.
'S'ils sont content d'être assis et de vous avoir là mariolant, faux-fuyant...' F1, 109.
*
 
MARLE n.m.
Souteneur. Par extension, homme du milieu particulièrement dur (DFNC). L'adjectif signifie 'astucieux', 'malin'.
'Si c'est la rigolade des marles !' F1, 160.
'Cinquante ans que je fonce le premier ! Marle à présent ! Marle ! lui d'abord ! Je l'incite ! Je l'injurie !' F1, 88.
*
 
MARMORIQUE , adj.
Néologisme à partir de  marmoréen, qui a la nature ou l'aspect du marbre.
'Comme il fut placé Casino !.. temple asiate, marmorique, berbère, laid, pas laid, biscornu, foutu, et les roses ! vous prie !' F1, 56.
*
 
MARRATEUR n.m.
Néologisme, sans doute à partir du croisement de marrer, faire rire, et narrateur.
'Voilà l'idée ! le mort marrateur ! alors je vous prie ! ma Statue ! mon Square ! mes Esplanades ! ma Ville ! Célinegrad !' F1, 119.
*
 
MARRE (AVOIR)
'Ah, vous avez marre à la fin ! chierie !' F1, 119.
*
 
 
MARRER vb. int.
Pour se marrer, 'rire'.
'Le trèpe marre ! gode !' F1, 154.
*
 
MARRER vb en emploi non pronominal.
Sens probable : faire rire.
‘Là, Clémence là c’était pareil… en plus de la vieille amitié qu’elle voulait me parler… rester coite… dandinante de biais sur la chaise… bredouillante deux mots… se retaisait… Je marre… Je marrerais…’ FI, p.11.
'- Transe, pote ! qu'ils se disent, transe ! tu nous marres !...' F1, 109 ;
'Votre sourire fige en bourrelets puants... la nature marre !' F1, 117 ;
'Bénédiction !... Foi d'agonique ! le cochon me marre !...' F1, 119.
*
 
MASCARADER vb. tr.
Néologisme à partir de mascarade.
'Toute votre sempiternellerie flanche, rompt !... la nature vous mascarade... internement...' F1, 117.
*
 
MAVENULE n.
?
'Je ne sais plus ce que je dis! Mavelune! L'émotion Maître! l'émotion!' F1, 41.
*
 
MEETINGE n.m.
Orthographe à moitié francisée de meeting.
'Ciné ! meetinges ! théâtre à poil, demi-poil !' F1, 113.
*
 
MÉMORER vb intr.
Néologisme à partir de se remémorer.
'Puisque je réfléchis là... mémore... ils m'ont secoué la médaille...' F1, 64.
*
 
MÉNOPAUSERIE n.f.
Néologisme à partir de ménopause.
 ‘Elle qu’est morte presque déjà elle-même !… d’infiltrations, ratatinage, de ménopauserie pourrie !’, F 1, 8. Cité dans Maurice Rheims : Les Mots sauvages, Larousse, coll. Le souffle des mots, 1989.
*
 
MERDERIE n.f.
Néologisme variante de merdier.
'- Merderie ! Merderie, ton âme !' F1, 94.
*
 
MÉRIQUEUX , adj.
Néologisme à partir de  américain.
'Et troulecteurs de romans russes, filandieux, anguleux, mériqueux, plagieux, anti-vous ! vous dégueulerez vos trahisons !' F1, 81.
*
 
MEZZOLOUFÉ
'Gaffe ! pas chuchoté le repentir ! mezzoloufé ! Non ! hurlé bel !' F1, 111.
*
 
MICRO (à la) n.f.
Pour à la radio. ‘À la micro des vaillants de Londres c’est ‘empalé’ !… New York l’hallali le plus terrible !’ F1, 6.
*
 
 
MIAULERIE n. f.
'Mais tout le temps y avait des alertes !... des sirènes !... des miauleries hautes !... (...) à moi ! des miauleries hautes !... plein les deux oreilles des moments ! des miauleries hautes !...' F1, 157.
*
 
MITOUFLÉ , adj. part.
Néologisme à partir de emmitouflé.
'Considérez aux eaux à Ax, à bagnoles, ces vieillards qu'on roule, mitouflés rogatons uriques, arthritiques à béquilles, podagres si tellement croquevillés, noués, souffreurs tous sens, ahanants acrobates d'enfer, face de gargouilles, hideux de supplices, calots hors...' F1, 71.
*
 
MOÂH pron.
Néologisme, sans doute à partir du pronom personnel moi. Accentue le sentiment d'égotisme.
'Ils m'imitent ! Je leur ouvrirai la gorge moi-même ! 'Moâh ! Moâh !' voilà !...' F1, 100.
*
 
MOCH ,
Pour moche, qu'on trouve dans le passage de Féerie, mais aussi pour Jules Moch, homme politique français. Si l'on prend en compte la seconde possibilité, Céline continue de jouer la carte de l'ambiguïté : Moch est en effet connu pour ses faits de résistance, mais aussi pour le rôle qu'il a joué, en tant que Ministre de l'Intérieur (1947-50), dans les dures répression des grèves (novembre 47, début 48).
*
 
MOMIGNARD , n.m.
Néologisme à  partir de môme, en référant à Roger Vaillant.
'Mon épurateur soi-disant, tout frais fier de sa mitraillette, momignard ivre du 'aucun risque', champion des joujoux du Nain jaune, qu'aurait eu ma belle botte au cul si je l'avais vu : y aura des vengeances!' F1, 44.
Le nain jaune, jeu de carte familial, est allusion à la revue Le Grand Jeu, lancée par Roger Vaillant avant la guerre. Par dérision, Céline affuble ce dernier du sobriquet. Roger Vaillant raconte dans Drôle de jeu (réédition Buchet-Chastel/Corrêa) que lui et d'autres résistants se réunissaient dans l'immeuble habité par Céline (4, rue Girardon). Au cours d'une de ces rencontres ils auraient envisagé d'assassiner Céline, puis avaient abandonné cette idée à cause du Voyage. À la sortie de Casse-Pipe, Roger Vaillant aurait regretté cette décision, d'où l'article 'Nous n'épargnerions plus Céline' (La Tribune des nations, janvier 1950). Voir note de la Pléiade IV, 1244.
*
 
 
MOTIF
'Lui le bagotier ! le coureur au motif comme pas ! son chevalet partout !...' F1, 134.
*
 
MOULE n.m.
1. Sexe féminin.
'Et votre moule bibiche?' F1, 39.
*
 
MOURRERAI , forme verbale à partir du futur mourrai.
'Vous verrez ! verrez les cruautés de ces rebuts ! d'ébaudissement que je mourrerai ! que tout est permis !...' F1, 46.
*
 
MOYE , pron.
Pour moi.
'Le chouchou des folles connes de haine : Moye !...' F1, 80.
*
MUFFÉE n.f.
Argot. Soûlerie. Vient de mufle, muffe, 'nez'. L'ivrognerie est ici dénotée par l'aspect du nez.
'De ces muffées qu'il prenait...' F1 144.
*
 
MUGISSEUR n.m.
Néologisme, dérivé de mugir, celui qui mugit.
'Je discute avec le mugisseur' F1, p.36.
*
 
MYTHOLOGISER , vb. tr.
Néologisme, à partir de mythologie, 'se souvenir en idéalisant'.
'Oh mais je vous rétrospective !... mythologise !...' F1, 100.
 *
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N

 

NANAN adj.
?
'C'est beau la charge au fantôme, vous voir, c'est nanan, c'est le vice, je vous rattraperai au charnier, je vous dépouillerai de vos peaux fumantes!' F1, 22.
 
NAVADAVOUILLE, adv.
Javanais. La note de la Pléiade (IV, 1270) indique : 'forme de javanais classique qui s'explique d'abord par le croisement de deux mots de sens voisin, nave et nadouille. Dans nadouille, vient s'insérer avant le noyau vocalique, dans chaque syllabe, la séquence -av : n-av-ad-av-ouille'.
'À quoi qu'il pensait en 14? Navadavouille ! personne le forçait d'être héros !' F1, 74.
 
NAUFRAGER vb.int.
Néologisme à partir de faire naufrage, en relation avec le désastre ( 'Rien m'enivre comme les forts désastres') :
'Je vous parlais donc de Rueil, du moment où tout naufragerait!'.
 
NÉCROMAN n.m.
Néologisme, amateur de cadavres. Variante de nécrophile avec suffixation empruntée à l'anglais. Voir 'affranchman' quelques lignes plus haut.
'Si vous eûtes l'hallali au trouf, les dames, les demoiselles ruteuses, les vieux amis la mousse au coin, nécromans, défouisseurs déjà reniflant votre carne, vous me comprendriez!' F1, 18.
 
NIX adv.
Néologisme à partir de nichts, rien en allemand.
'J'ai jamais rien vvendu de béton, ma foi sacré, ni Pyramide, ni le cercueil de Napoléon (...) Nix !' F1, 34.

 

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O

 

OUQUE (dans forteresse d'Ouque)
La note de la Pléiade IV indique (1238) que la forteresse d'Ourque n'a pu être retrouvée. La mention du Pas-de-Calais (les Allemands s'attendaient à un débarquement allié sur les côtes de ce département) fait pourtant penser à un nom de consonance nordiste ou belge (l'Ourq est un affluent de la Marne, et le canal de l'Ourq fait communiquer l'Ourq avec la Seine). Peut-être s'agit-il tout simplement d'une transcription phonétique de 'd'où que' dans l'expression (également utilisée fréquemment dans les milieux populaires du nord de la France) 'd'où qu'tu viens?' - pour d'où viens-tu. Céline aurait ainsi inclus dans un nom de lieu imaginaire le sens d'un lieu quelconque. Dernière hypothèse : il s'agit des plans des forteresses volantes, bombardiers américains ayant fait leur apparition en 1942. On explique mal la présence de 'Ouque', à moins qu'il ne s'agisse d'une transcription déformante de Ike, surnom donné à Eisenhauwer, en charge des débarquement alliés en France.
'Je suis celui qu'a vendu le Plan 'Dache', la forteresse d'Ouque, le Pas-de-Calais, la tour Eiffel... et les arrières-pensées de Gamelin...' F1, 35.
 
OBOLER, v.intr.
Néologismepour faire l'obole.
'Faut que je vous repardonne ?... Ce que j'ai déjà passé l'éponge ! Obolez d'abord ! et dur !... on verra!...' F1, 72.
 
OCCIEMENT n.m.
Néologisme par substantivation à partir d'occir. Voir 'assasser'.
‘Tout de suite après le Débarquement, l’occiement national total ! toutes les salopes à la boucherie’, FI, 10.
 
ORAISSONNER, vb intr.
Néologisme à partir de oraison.
''J'oraisonne ! j'y crie. J'oraisonne ! ' F1, 47.
 
ORS
'L'hypnotiseur des cavernes !... tiédeur, moiteur, peluche, branlette, orgues, ors !...' F1, 80.
 
OUFFRE et BOUFFRE
'Ah les 'Marsouins' ! cette géante clameur que ça lève ! ouffre ! bouffre ! gouffre ! plus fort que les pièces !... C'est le peuple en entier ! c'est l'enthousiasme !...' F1, 107.
 
OUIOUINTÉS, p. p.
Néologisme. La note de la Pléiade (1273) reprend l'analyse d'Alphonse Julliard (Les Verbes de Céline, IVe partie, p.111), selon laquelle le verbe ouiouinter est un croisement de l'onomatopée célinienne ouin ! ouin ! avec l'anglais annoint, 'oindre', consacré : 'Le thème ouinouin- exprime le caractère informe, inarticulé, puéril, des œuvres consacrées, alors que la terminaison -ouintés, de l'anglais annointed, exprime le caractère excessif d'une consécration quasi religieuse'.
'Vous méfiez pas ? refileurs de rebuts de Zola ouiouintés yankee !' F1, 81.
 
OUTRE-LÀ loc. adv.
Dans l'au-delà.
'Je les emmerderai d'outre-là!...' F1,62.
 
OUVRAGER vb. transitif avec pronom personnel.
Sans doute équivalent de 'travaillez pour nous', ou bien travailler sur nous, par allusion obsène.
'Ouvragez-nous! Ouvragez bien ! Jouissez. Maître Jouissez!' F1, 42.
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Q

QUATZIEUX
Pour quatre yeux.
'Ah, la façon que vous serez à voir entre quatzieux !...' F1, 79. 
 
QUIQUI n.m.
Argot. Pénis.
'J'allais l'agrafer au quiqui moi !' F1, 149.
 
QUOUASQUE, pro. interr.
A partir de [à] quoi est-ce que.
'À quouasque je pourrais pas prétendre ?' F1, 64.
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R

 

RACCA  interj.
La note de la Pléiade (IV, 1242) indique qu'il s'agit d'une interjection de mépris 'd'origine araméenne et employé dans l'Evangile. Bien que son origine soit toute différente, il doit, pour une oreille française emprunter quelque chose de son sens à racaille, très proche phonétiquement'.
'Ah je savais que je vous ferais plaisir! Panache! Gloire! Honneur! Victoire! Racca! You! You! Envie!' F1, 41.
 
RAGGLUTINER vb. tr.
Néologisme à partir de agglutiner.
'Ils me retournent des bouts de viande encore ! Ils me recollent ils ragglutinent tout!... Ils me reretassent !' F1, 90.
 
RAISONNEUX adj.
Néologisme à partir de raisonneur.
'Oh là ! baudruche, gadouilleux cave ! crève raisonneux !' F1, 76.
RÂLERIE n.f.
'La râlerie finie !...' F1, 134.
 
RAMALGAMER vb tr.
Néologisme à partir de amalgamer, faire subir au corps torsions et écrasements.
'Ils retapetassent tout ! me ramalgament !' F1, 92.
 
RAMBOT
?
'Huit plombes ! rambot, place des Ternes !...' F1, 113.
 
RAMPONNER vb intr.
Donner des coups.
'Vous redéboulez votre toboggan, voguez, ramponnez, drossez! Encore plus bas!', F1, 15.
 
RAM! STRAM! GRAM! interjections.
La note de la Pléiade indique à juste titre que Stam est la première syllabe de Stamgericht, très présent dans Nord, et Gram le nom du chef de service du Sonbye hospital, évoqué dans DChA.
 
RANZ n.m.
'Les ranz des vaches sont des airs joués sur leur cornemuse par les gardiens de troupeaux suisses' (Note Péiade IV, 1266). Céline, dans le passage de F1, se décrit en proie poursuivie à travers l'Europe par ses ennemis. Mais dans le même mouvement, à partir de l'évocation des cors (trompes), il se transforme en vache, ou plutôt en taureau, dont les cornes blessent ses poursuivants.
'Si je leur fourvoye leurs galoperies... le ranz ! oui ! vaches ! vaches ! pleurez cuivres ! F1, 67.
 
RAPETASSER ou RETAPETASSER vb.tr.
A comprendre dans le sens de rapetisser, sous l'influence de tasser.
'Ils me la tassent dans leur brouette !... rapetassent !...' F1, 90 ;
'Ils retapetassent tout ! me ramalgament !' F1, 92.
 
RAPS
?
'Moi j'ai entendu des 'raps' moi qui vous parle... des fracassements de bahuts géants ! ' F1, 58.
 
RATATER vb.tr.
Néologisme à partir de ratatiner, mettre à mal, tuer.
'Fallait peut-être qu'on me ratate ? Le môme là ? ou un autre ?...' F1, 23.
 
RATEUX adj.
Néologisme, sans doute pour raté.
' - Qu'a pas Féerie, plouc et miteux ! Crotteux, rateux, ignare, barbare ! enculoman sans horizon !' F1, 112.
 
RALLÉGER vb. intr.
'Vous dire la hideur de l'être ! Et tous à présent qui rallègent ! pisser qu'ils veulent !' F1, 94.
 
RARRIMER vb tr.
Néologisme à partir de arrimer.
'Je l'avais reficelé, rarrimé bien !...' F1, 151.
 
RATATINAGE n.m. 
Néologisme à partir de ratatiner.
‘Ils sont venus voir un prochain mort, un demain pendu, elle qu’est morte presque déjà elle-même !… d’infiltrations, ratatinage, de ménopauserie pourrie !’ F1, 8.
 
REBOUMER voir BOUMER
 
 
REBRETELER vb. int.
Néologisme à partir de breteler, 'mettre les bretelles'.
'Faut le rebreteller... une histoire !...' F1, 150.
 
RECOMPRESSER vb.
'Je voulais arriver à Arlette ! J'écarte trois gens... s'en recompressent douze !...' F1, 149.
 
RÉCORCHER vb. tr.
Néologisme à partir de écorcher et du préfixe itératif r-.
'Qu'on le relacère! récorche vif!' F1, 25.
 
REDODELINER vb.tr.
'Ils vous ont louché dur au cul... renfrogné, dodeliné... vous ont forcipressé bien l'oigne, y introduit dix... vingt petites mèches !... hum ?... hum ?... redodeliné, rehumer ...' F1, 114.
 
RÉÉDIFIER vb. tr.
'Je suis avec ceux qui réédifient, reboument les Cités' F1, 60.
 
REFARFOUILLER vb. int.
'Vous dites il est sage... il est pas ! le voilà refarfouillant touillant...' F1, 127.
'Il refarfouille ramène une statuette...' F1, 157.
 
 
REFESSER vb.
'Il me refessait les beautés !... méchamment !...' F1, 142.
 
 
REFICELER vb int.
Néologisme à partir de ficeler, 'attacher'.
'Je l'avais reficelé, rarrimé bien !...' F1, 151.
 
REFOUETTER vb.
'S'il vous refouette ! cingle !...' F1, 110.
 
REHISSER,
'Ils me rehissent à l'Hosto!...' F1, 39.
 
REHUMER
'Vous contorsionner à l'envers, miroir devant, miroir derrière, accroupi, disloqué, pleurant, le nez dans vos hémorroïdes, vous humant, rehumant encore ?...' F1, 114.
'Ils vous ont louché dur au cul... renfrogné, dodeliné... vous ont forcipressé bien l'oigne, y introduit dix... vingt petites mèches !... hum ?... hum ?... redodeliné, rehumer ...' F1, 114.
 
REHURLER vb tr.
'Des fois ça l'interrompt pas mal... un quart d'heure... une heure... et puis il rehurle!' F1, 37.
 
REJEUNESSE n.f.
Voir rejuvénation.
'Et Bébert qu'a plus de dents, de moustaches !... (comme moi !)... une rejeunesse qu'il faut refleurir !...' F1, 54.
 
REJUVÉNATION n.f.
Voir rejeunesse. Néologisme à partir du préfixe re- et de l'adjectif juvénil.
'La rejuvénation par zèle !' F1, 71.
 
RÉJUVÉNER vb. tr.
Néologisme. Rendre plus jeune.
' 'Acheter Féerie ! achetez Féerie ! le livre qui vous réjuvène l'âme, boyaute le boyau !' ' F1, 111.
 
RELACÉRER vb.
Néologisme à partir de lacérer et du préfixe itératif re-.
'Qu'on le relacère, récorche vif!' F1, 25.
 
 
REMEMORER vb. int.
'Je remémore... comment il a séduit Arlette-cul-de-jatte pisseux Jules ?' F1, 165.
 
RENFOURNER vb.tr.
Néologisme pour remettre.
'Où que j'irais ?... Ils me renfourneraient dans leur brouette, et yop ! en route !' F1, 96.
 
RENOURRITURE, n.f.
Néologisme pour se nourrir à nouveau après un jeûne pseudo-mystique
'Plus que morfondus, suicidaires, à moi !... à la renourriture ! agoniques !...'F1, 69.
 
RÉNUMÉRER vb.
Néologisme à partir de énumérer et du préfixe itératif r-
'Je vous rénumère...' F1, 26.
 
REMBRUMER vb int.
'Mes yeux rembrument... je vois flou...' F1, 39.
 
REPARDONNER vb. intr.
'Faut que je vous repardonne ?...' F1, 72.
 
 
REPELOTER
'Et il la pétrit, repelote, là couchée, allongée...' F1, 154.
 
REPTER vb. intr.
Néologisme à partir de reptation.
'Je vous laisse en accès... râlant... reptant !' F1, 72.
 
REREPLIER vb. tr.
'Et vous voilà rereplié en quatre ! en huit ! Ah gymnastique à miroir !' F1, 114.
 
RERETASSER vb. tr.
'Ils me retournent des bouts de viande encore ! Ils me recollent ils ragglutinent tout!... Ils me reretassent !' F1, 90.
 
RESPOIR n.m.
'Vous vous tenez plus ! Ah regain ! Ah, respoir !' F1, 115.
 
RÉSUMATION, n.f.
Néologisme pour résumé. À noter que dans F1, Céline tente à plusieurs reprises et sur un mode parodique (Readers' Digest) de faire l'improbable résumé d'une intrigue absente.
'Sus à la douleur ! Aux microbes ! à la fatigue ! à la mort ! à vingt-cinq formes de désespoir au moins!... Ah, résumation, tribulations ! Nèfles ! Crottes ! Bon Dieu!', F1,16.
 
RETAPETASSER, voir RAPETASSER .
 
RETOURRER
'Et je m'en reprends et je leur en retourre !... ils se sauvent !' F1, 68.
 
 
RETRIFOUILLER vb. tr.
'Il se retrifouillait les cuisses, ses bouts de moignons qui lui faisaient mal... une autre manie...' F1, 132.
 
RETROSPECTIVER vb. tr.
Néologisme à partir de rétrospection, se souvenir pour un auditoire.
'Oh mais je vous rétrospective !... mythologise !...' F1, 100.
 
REVITAMINISÉ, p.p. à valeur adjectivale,
Néologisme, à nouveau plein d'énergie.
'Vous me verriez retourner au gniouf! cet entrain! l'espoir! revitaminisé à bloc!' F1, 39.
 
REVOUSSER vb.tr.
'Votre écopette à l'envers !... replongez hardi !... revoussez !... vos poumons peuvent plus !... étouffez ! et revoussez ! foncez au fias !' F1, 114.
 
RICANAGE n.m.
Néologisme pour ricanement.
'Le ricanage des mouettes au vent...' F1, 43.
 
RIGODONNÉ p. passé
Néologisme à partir de rigodon. D'un mouvement vif.
'Ce tout très rigodonné ! enlevé !' F1, 105.
 
RIS n.m.
Sans doute 'comédie' à partir du sens donné en français médiéval (XIIIème siècle) et du moyen français : sourire (Greimas, Keane : Dictionnaire Larousse du moyen français)
'Pas un seul rival! Prose, drame, verses, ris' F1, 20.
 
RODOMONTER vb. intr.
Néologisme à partir de rodomontade, vantardise pleine d'insolence.
' - Oh, mais il rodomonte, parole !' F1, 72.
 
ROGNON n.m.
Rien.
‘Je fais partie du grand soulèvement, mes rognons, ma tête, mon aorte…une épaisseur d’un mètre de viande est promine, place de la Concorde ! ’ F1,  9.
 
ROHNORATION, n.f.
Néologisme à partir du préfixe re-, et de honoration, mise à l'honneur.
'Le Panthéon ? Soit ! J'accepte !... la rhonoration officielle !... assez déshonoré vivant !' F1, 69.
 
RONCEVEUX adj.
Néologisme pour de Roncevaux.
'Et quelles stridences ! ah autre chose que le Roland ronceveux !... corneux coin coin !' F1, 108.
 
RONGER (SE) vb. pron.
Vb pronominalisé, avec élision de 'les freins'; allusion à la période d'exil de Klaskovaard, où Céline travaille à la deuxième version de Féerie pour une autre fois 1.
'Le roi Oluf, là d'où je me ronge, il pourrait pas me sortir d'un mot!' F1, 15
 
 
ROUDOUDOUTANTE adj.
'Nitouches !... toutes roudoudoutantes, hésitantes, elles traversaient... déhanchements d'une autre espèce d'êtres !' F1, 137.
 
ROUPIOT n.m.
Le plus bas niveau de la hiérarchie : jeune commis, apprenti, voire aide-soignant.
''Tu vas user plus que tu ne gagnes !' que s'inquiétait déjà maman. C'était pas bien difficile puisque je touchais rien du tout. C'est vrai que dans certains métiers les roupiots payaient pour apprendre. En somme, j'étais favorisé' MàC, 625 ?
'Le médecin-chef passe dans le couloir... il effleure le bouton de votre porte... il entre pas... il défend aux roupiots d'entrer' F1, 118.
Hist. - D'après le Dictionnaire du français non conventionnel, l'origine de ce mot daterait de 1925 mais reste douteuse : 'Peut-être dérivé de roupieux, signifiant penaud, d'où Esnaut fait venir roupion, commis. (...) Une influence de loupiot, enfant, peut aussi être invoquée'.
 
ROUSTISSEMENT n.f.
'Eh vous là, qu'hurlez, fumant ! et ça que commence !... après le dépouillage, croustillage !... roustissement et darderie !...' F1, 110.
 
RUBANNÉ p.p. adj.
'Y a des vernis des tarots, trouvères du tonnerre, rubannés, rentiers... maquereaux des féees !' F1, 89.
 
RURBANNISER vb. tr.
'Toute sa guitoune !... tout branlait, moisi... tout le coin devait être rurbanisé tout l'îlot et le Maquis derrière...' F1, 130.
 
RUTEUSE adj.
Néologisme. En rut, avec assimilation de l'excitation sexuelle au désir de vengeance et de violence. Thème récurrent chez Céline.
'Si vous eûtes l'hallali au trouf, les dames, les demoiselles ruteuses, les vieux amis la mousse au coin, nécromans, défouisseurs déjà reniflant votre carne, vous me comprendriez!' F1, 18.
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S

 

SANFRUSQUIN n.m.
Variante de 'saint-frusquin', à partir de 'frusque', affaires.
'Tout est parti à l'avenue! au moment du grand soubresaut! Tout le sanfrusquin' F2, 434 ; 'La haine que j'ai du babouilli ! Surtout cette convoitise en plus pour mon sanfrusquin!...' F1, 18.
 
SALAUDE n.f.
Néologisme pour salope.
'- Au sprint ! grinçante rouillée salaude !' F1, 72.
 
SALISSEUR n.m.
Néologisme. Qui salit.
'Malheur aux Salisseurs d'héros ! plaies de feu aux Iconoclants !' F1, 103.
 
SAPERLIPOPE interj.
Néologisme à partir de saperlipopette.
'Oh mais je vous rétrospective !... mythologise !... beaucoup, je me permets !... pas myhtologique le '115' ! et le '40' donc, saperlipope !' F1, 100.
 
SAPHISTIQUE adj.
Néologisme à partir de saphique, relatif au saphisme, c'est-à-dire à l'homosexualité féminine.
'Et émoustilleuses et causeuses et cavaleuses de musettes !... grands magasins ! caves saphistiques !...' F1, 80.
 
SATANIE n.f.
Néologisme pour satanisme.
'A pillé, outragé, traqué, enchristé, sali, un héros ! lui infligé mille satanies, mille mille hontes ! misères !' F1, 109.
 
SEMPITERNELLERIE n.f.
Néologisme à partir de sempiternel.
'Toute votre sempiternellerie flanche, rompt !... la nature vous mascarade... internement...' F1, 117.
 
SISITE adj.
Néologisme à partir de assis.
'Chez vous ! sisite ! sage, fondant...' F1, 49.
 
SLOGANISÉ p. passé.
Néologisme pour 'réduit à un slogan'. Péjoratif.
'Sloganisé, blablatisé, glotte au croupion, rabâcheur d'étronimes sottises, méchancetés lâches, délations folles, cacatoïsé plus et plus !' F1, 109.
 
SOUFFREUR adj.
Qui souffre.
'Considérez aux eaux à Ax, à bagnoles, ces vieillards qu'on roule, mitouflés rogatons uriques, arthritiques à béquilles, podagres si tellement croquevillés, noués, souffreurs tous sens, ahanants acrobates d'enfer, face de gargouilles, hideux de supplices, calots hors...' F1, 71.
 
SOUPER vb. intr.
Néologisme sémantique. Le Vocabulaire populaire et argotique indique : 'regarder avidement (cf. manger des yeux, dévorer du regard).
' - Tu mates eh fausse vache ! Monsieur soupe ! - Mais non je soupe pas, menteur ! vampire ! toi qui dévores !' F1, 146.
 
SUBLIMITÉS n.f.
'C'est naturel ! cinquante-sept années d'héroïsme ! de sublimités de guerre et de Paix... j'en crèverais pas ? ' F1, 51.
 
SUPERSTEINIEN adj.
Néologisme à partir de super et de Einstein.
'Grande braderie des Univers courbes supersteiniens !...' F1, 73.
 
SYRIOPERSE n.m
'Bientôt vous pourrez plus râler en propre [en français]... faudra que vous empruntiez au volske, au syrioperse, à l'angloslangue.' F1, 119.
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T

TAGADADAM onom.
Reproduit le galop du cheval.
'Vous êtes emportés, compressés, la charge, genou à genou !... tombeau ouvert !... jusqu'au ciel l'écho ! jusqu'au ciel ! Tagadadam ! Tagadadam !' F1, 100.
 
TANTIÈME n.f.
'Je veux leurs noms leurs promotions leurs grades de sadiques, leurs sécurités, leurs tantièmes tout en lettres d'or, en plein granit, dans la Sainte Chapelle !' F1, 160.
 
TARIN n.m.
Argot. Nez.
'Ah les tarins ! tous en l'air !' F1, 147.
 
TCÉTÉRA adv.
Néologisme à partir de et cetera.
'Jamais de dur dans la nourriture, tout du mou! bouillies! Tcétéra... mou! mou! mou! que mou!' F1, 40.
'le lieu est impeccable mais triste, Panthéon... verrouillé, scellé, tcétéra... Ô cette solitude entre morts !' F1, 124.
'Je suis pas povo:ite ? ouizoucrotte ? pas artiste, entendu, comme Jules ! modeleur, tcétéra !...' F1, 146.
 
TÉTÈRE n.f.
Argot. Tête.
'Je voudrais qu'il se la crève la tétère ! Il se la crèvera pas !' F1, 87.
'C'est pas les ouraganda qui me manquent !... plein la tétère...' F1, 100.
Hist. - La première occurrence date de 1896. Le Dictionnaire du français non conventionnel indique qu'il s'agit sans doute d'un croisement probable de la finale redoublée de pomme de terre, dont l'équivalent familier patate a le même sens.
 
TEUF-TEUF n.m.
'La nuit là, d'où je vous parle, en fosse, j'entends, je réentends... dites!... les sanglots des viôôôôlons ! ils me miaulent !... et les cornes pouing, pouing, du Quai !... les teufs-teufs, leur asthme !...' F1, 57.
 
TINTINNABULERIE n.f.
Néologisme à partir de tintinnabuler.
'Grincez ! Grincez ! Grincez mimi !... juste comme la brouette à Ciboire !... tintinnabulante aussi dit ! tintinnabulerie est partout !...' F1, 99.
 
TOC
'C'est toc', à partir de 'c'est du toc', cela ne vaut plus rien.
'C'était flatteur avant la guerre... 'Céline, mon pote'!... Maintenant c'est toc!' FI, 12.
 
TOISE n.f.
Désigne un instrument de mesure de la taille d'un sujet humain, et en particulier le militaire. Passer quelqu'un à la toise, c'est prendre sa mesure. Au conseil de révision (dont il s'agit dans l'extrait ci-dessous), le conscrit prendre sa toise parce qu'il est en quelque sorte écrasé par l'équerre mobile (Dictionnaire du français non conventionnel).
' Nous voilà devant la Révision ... / - La toise !... Que vous avez fait de votre médaille ?... Votre pension ?... Votre classe ?... Garde à vous !...' F1, 103.
 
 
TORCHE-CHOSE n.m.
Pour torche-cul.
'Ah, soixante-quize pour cent héros, si elle va vous casser le bon cœur la Cour Ultime ! votre Amnestie torche-chose !' F1, 160.
 
TOUPILLER (SE) vb pron.
Néologisme à partir de toupille. Tourner sur soi-même.
'Et il se tourpille dans sa caisse !' F1, 154.
 
TOURBILLERIES n.f. pl.
'Je tombais en lambeaux ! autre chose que le vent un petit peu ! et mes tourbilleries !... Les gardes m'ont sauvé l'existence !...' F1, 50.
 
TRANS'POUËT ou TRANS'PE
Néologisme. D'après la note de la Pléiade, un autre avatar de trempe (voir tremponette, volée de coups). On s'explique mal la présence de pouët et le fait que la première lettre du mot soit écrite avec une majuscule.
'Ton âme de vache dans la Trans'pouët!/Prendra du champ!' chanson 'Règlement' citée par Céline, F1, 37 ;
Ton âme de vache dans la trans'pe !' F1, 87.
 
TRANSYLVAN adj.
Transylvain ou transylvanien.
'Les tziganes, les Princes transylvans !...' F1, 55.
 
TRANTRAN n.m.
Néologisme, peut-être à partir de train-train, routine.
'Il pourra se fendre la lurelure, Putois ! dans le trantran des horreurs, salut !...Personne tiquera !...' F1, 96.
 
TRÈPE n.m.
Argot. Variante régionale de troupeau, puis foule.
'Le trèpe se rue sur les 'Librairies'...' F1, 54.
'Je me rebiffais ? Je lui sautais sur le lard ?... le trèpe là tout autour, la curée !... ils m'écharpaient !' F1, 151.
'Il aurait appelé au secours, toute l'Avenue, tout le trèpe raffluait !' F1, 152.
'Le trèpe marre ! gode ! bon !' F1, 154.
 
TREMPONETTE n.f.
La note de la Pléiade IV (1238)  insiste sur les diverses déformations du mot trempe (volée de coups) dans l'œuvre. Ici croisement avec tamponner, rosser, et suivi du diminutif -ette.
'J'entends des coups, la tremponette, deux fois par jour...' F1, 35.
 
TRISSER vb. int.
Partir, s'en aller rapidement.
' - Fous le camp aussi toi ! Trisse ! Fatigue !' F1, 151.
' - Trisse !' F1 157.
 
TRONCHUS, n. m. pl.
'Toujours des bourreaux dans Paris ! toujours des tronchus, des branchis, des estrapadés ! des bouillus ! juste savoir de quelle secte vous êtes ? ' F1, 48.
 
TROUDUCTEUR n.m.
Néologisme à partir de trou du cul et traducteur. Voir troulecteur.
'Et les falsifieurs sabordeurs 'trouducteurs' ?' F1, 81
 
TROUF(E) n.m.
Néologisme apocope de troufignon, postérieur.
'Si vous eûtes l'hallali au trouf ... ' F1, 18 ;
'Mais pas que le pellage au trouf!' F1, 26.
 
TROUFIGNERIES n.f.
Néologisme à partir de troufigner, diminutif de troufignoler, sodomiser.
'Je verrais plus personne plein mes murs... ni l'autre émerger, l'Hortensia, m'offrir ses troufignerie Louis XIV!' F1, 64.
 
TROUILLEUX interject.
Néologisme à partir de trouillard.
'Faux-fuyeux! Trouilleux! Libige! mauvaise fois! cochon!' F1, 36.
 
TROULECTEUR n. m.
Néologisme à partir de trou du cul et lecteur.
'Troulecteurs de romans russes' F1, 81.
 
TURLURE voir LURELURE
 
TURLUTUTURE n.f.
Néologisme à partir de turlututu qui désigne dans sa première acception une flûte, un fifre ou un mirliton. En antiphrase, quelque chose qui n'est pas léger, qui vient en nombre.
'Moi je me lancerais par exemple, vous verriez !... ça serait pas de la turluturure !... Seulement ... seulement ... qu'en fanfare ! Ah, ma condition ! qu'en fanfare ! à cent cinquante-six trompettes et cors et cymbales ! timbales ! fanfare, la grande !...' F1, 106.
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U

 


V

 

VACANCER vb. int.
Néologisme, pour prendre des vacances
'Et les murmures et les violons, et les personnes des Postes de loin, des Cornouailles, du Léon, Bocage et jusque Nantes qui viennent vacancer jusque-là !...' F1, 56. Il s'agit ici des bateaux (postes) portant le non de Léon, ou Bocage venant du sud de l'Angleterre (Cornouailles) et allant jusqu'à Nantes.
 
VACUMMCLINING n.m..
Mot françisé pour vacum cleaning, à partir de vacum cleaner, aspirateur en anglais.
'Ce Vacummclining! Pas une lame de parquet tranquille!...' F1, 25.
 
VANITATAS n.f.
Néologisme, croisement de latin et de javanais, vanité.
'Oh je m'amuse! vanitatas! Invivia! Javalousie! Comme Jules?' F1, 21.
 
VENIR vb. en emploi cod.
‘Elles ondulent, elles me viennent sur les genoux’ F1, 10.
 
VENTREMER interj.
'Écumez! Ventremer! Le cor! Au cor!' F1, 22.
 
VENTRIPOSEUSE adj. f.
Néologisme pour ventripotent.
'Vous dites : vous aurez une auto ! Non ! L'auto est ventripoteuse, semi-corbillarde à flapis ! Je corbillerai pas !' F1, 71.
 
VERSE n.m.
Néologisme. Peut-être influence du mot anglais : vers, poésie.
'Pas un seul rival! Prose, drame, verses, ris!...' F1, 20.
 
VERNO adj.
A partir de verni, 'chanceux'.
'Vous viendriez vous diriez : 'Oui! Il ment pas!' enfin il ment pas! Il dit vrai! Saloperie alors! Verno! Ils l'enchristent! martyr! et musique! Il ose! Il ose!' F1, 43. La note de la Pléiade IV (1243) explique ce passage difficile : pour le lecteur, 's'il se révèle que Céline dit vrai et que les Danois l'ont emprisonné, c'est une chance pour lui (verno), il va pouvoir se poser en martyr, et en musique, 'et il ose se plaindre!'
 
VERVEUX adj.
'Normalement je suis gai et mutin, verveux, allègre, Vermot, espiègle!' F1, 22.
 
VESTE (TOURNER EN)
'Tenez par exemple, pour ce livre c'est rare que ça tourne pas en veste!...' F1, 22.
 
VIÔÔÔÔLONS n. onomatopéique.
En référence aux vers de 'Chanson d'automne' de Verlaine Les sanglots longs/ Des violons/ De l'automne.. et sans doute à leur utilisation sur les ondes de BBC comme message codé à l'adresse des Résistants.
'La nuit là, d'où je vous parle, en fosse, j'entends, je réentends... dites !... les sanglots des viôôôôlons! ' F1, 57.
 
VLAOUF onom.
Décrit le bruit que fait la rame de Caron (Charon) sur le crâne de ceux qui se refusent à monter dans sa barque. Cette image, dont on trouve une première mention dans Féerie 1, est reprise plus longuement dans l'épisode de La Publique dans D'un château l'autre, II, 79-86. Elle trouve son origine dans La Divine Comédie de Dante. 'Charon, avec des yeux que la colère enflamme,/ Les pressait tour à tour et frappait de la rame / Tous ceux qui paraissaient tarder trop à partir. (Chant III). Voir sur ce point la note de la Péiade IV (1268).
'Du plus loin que me verra Caron : 'Arrive !' qu'il me fera... et vlaouf ! ... ma gueule... sa rame !... vlaouf ! encore !'
 
VOLSKE
?
'Bientôt vous pourrez plus râler en propre [en français]... faudra que vous empruntiez au volske, au syrioperse, à l'angloslangue.' F1, 119.
 
VOULUEMENT adv.
Néologisme à partir du participe voulue, 'volontairement'.
'Je romantise pas vouluement...' F1, 43.
 
VOYOUE
'Le Jules ! (...) Sa passe voyoue !' F1, 138.
 
VROOOMB, onom.
Décrit le bruit que fait la tête du voisin de cellule contre le mur.
'Et vrooomb! à fendre l'édifice !...' F1, 74.

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X
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Y

YEOP interj.
' 'Yeop ! Yeop !'ils peuvent s'éclater la gorge !... tous les prisonniers là d'autour !...' F1, 96.
 
YO interj.
'Qu'on le relacère! récorche vif! Yo! Yo! Yo! yes! Dix mille pour cent!' F1, 25. Noter ici que le pourcentage désigne ici le degré d'invalidité. D'habitude, Céline cite 75%.
 
YOP interj.
'Où que j'irais ?... Ils me renfourneraient dans leur brouette, et yop ! en route !' F1, 96.
 
YOU interj.
Tournure agressive que dans un premier temps on peut assimiler au pronom personnel anglais vous, ou tu. Cependant, la variante du manuscrit de Féerie (Pléiade IV, 1242) indique qu'il s'agit d'une version écourtée du mot youtre. Même pendant et après son exil danois, Céline continue de distiller d'une façon plus ou moins discrète et détournée son antisémitisme. Ainsi, le professeur Y, pour youtre, youpin, etc. Noter, cependant, que dans le contexte de cet extrait, l'insulte s'adresse aux Algériens, avant que, dans un second temps, soit faite mention de l'holocauste  ;
'Ah je savais que je vous ferais plaisir! Panache! Gloire! Honneur! Victoire! Racca! You! You! Envie!' F1, 41 ;
'ah you... you... you! (...) au four tous! tout! mille fours!...' F1, 41.

 

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Z

 

ZAINEUX adj. pl.
Néologisme pour haineux.
'Où irais-je déterrer vos os ? abrutis zaineux zespirez !' F1, 108.
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ZASSEZ
Pour assez quoique précédé d'un mot ne finissant pas en -s.
'Il m'a fait zassez souffrir !' F1, 49.
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ZESPIREZ
'Où irais-je déterrer vos os ? abrutis zaineux zespirez !' F1, 108.
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ZOUSQUE
Pour jusqu'où.
'Vous errez zousque ?' F1, 81.
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ZOUST interjection.
‘Fous-moi le camp ! Toi, ton môme ! et zoust !’, F I, 8 ; F1, 52 ; F1, 151.
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ZOZOTEUR n.m.
?
'Il s'élance! reporter, porteur, rapporteur, zozoteur!' F1, 40.